Qui monte, qui monte, qui monte

18 Mar

Vendredi 14 février

Nous arrivons à Valparaiso, Valpo pour les intimes. La route du terminal au Cerro Carcel est bourrée de petites échoppes qui vendent des ballons en formes de cœur, des chocolats et des babioles en tout genre. Aujourd’hui c’est la Saint-Valentin. On débarque totalement. Hadrien demande à un jeune couple la direction du centre ville. Perplexe, la fille rigole avant de nous expliquer qu’on ne peut définitivement pas parler de « centre ». La ville s’étend en effet sur plusieurs kilomètres. Après avoir indiqué le Cerro Carcel donc, nous filons à l’auberge Verde Limon, conseillée par le Routard. Tout est très joli. La petite place juste devant l’auberge est recouverte de mosaïque. Le problème c’est que nous sommes vendredi et qu’il n’y plus grand chose de libre. Pour le soir nous décidons de prendre la seule chambre encore libre : le loft. Pour 25000 pesos chiliens, soit moins qu’à l’auberge de Santiago, nous avons une chambre immense avec cuisine, salle d’eau et télé ! Le luxe ! Nous réservons aussi nos deux nuits en dortoir pour les jours d’après. Mais pour la nuit de demain, il n’y a rien de rien. Nous partons donc à la recherche d’une autre auberge. Nous en profitons pour flâner dans les rues et mitrailler les murs. Les artistes porteños sont bigrement doués et on ne sait plus ou donner du regard.

Baleines murales

Baleines murales

Nous finissons par atterrir a La maison de la mer, une autre auberge conseillée par notre guide. Lorsque le propriétaire arrive, la première question qu’il nous pose est : où se trouve le mont St-Michel. C’est notre billet d’entrée dans l’auberge. L’endroit est très sympa aussi, nous allons pouvoir profiter du petit jardin et de la jolie tonnelle. Le dortoir réservé, nous retournons nous balader. Sur notre chemin nous nous laissons guider par l’odeur du pain chaud. La piste nous amène jusqu’à un lieu autogéré, une résidence d’artistes que nous visitons en attendant la prochaine fournée de pain. Notre butin en poche nous filons skyper à l’hôtel. Hadrien part chercher notre petit déj’: Toddy et confiture artisanale. Après cette première journée nous profitons du câble avachis sur le lit. Pas moyen de regarder Adventure Time, alors nous nous rabattons sur des débilités : Next et Titanic mal doublé.

Samedi 15 février

J’essaye, via le téléphone de l’auberge, de contacter Valentina afin qu’on puisse se voir. Pas de réponse. Une grosse demi-heure plus tard, la fille de l’auberge court dans les escaliers pour m’apporter le téléphone. À la voix de Valentina, je devine que je l’ai réveillée. Nous nous donnons quand même rendez vous vers 15h. En attendant, Hadrien et moi allons faire une grande balade dans la ville qui, décidément appelle à la flânerie. Sur le port se pressent les touristes qui, comme nous, sont venus observer les impressionnants porte-conteneurs.

Dans le port de Valpo

Dans le port de Valpo

D’autres s’amassent près des embarcations qui les emmèneront faire le tour du golf. Les rues voisines sentent très fort, et sur une place de vieux alcooliques décuvent ou continuent à boire. Nous grimpons finalement sur le Cerro Cordillera par un vieil ascensor en bois. De là haut, la vue est très belle et nous faisons doublement attention, de nombreux Porteños nous ont prévenu que le quartier est dangereux. Cela a-t-il à voir avec son ancienneté ?

Escalier infini jusqu'au Cerro Cordillera

Escalier infini jusqu’au Cerro Cordillera

Nous descendons par les 1526943 marches le long de l’ascensor puis filons à la plaza Anibal Pinto en bas de la rue Cumming pour rejoindre notre amiga. Nous montons ensuite au Paseo 21 de Mayo, où un mirador permet d’observer le port de très près. Hadrien ne regrette plus de ne pas avoir pu entrer dans le terminal portuaire.

Terminal à conteneurs de Valpo

Terminal à conteneurs de Valpo

Au loin, dans la baie, on devine la petite sœur de Valpo: Viña del mar. Sur un axe parallèle au littoral nous prenons un trolley, bus électrique à mi-chemin entre le tram et le bus. C’est une des fiertés patrimoniales de la ville, pas vraiment plus utile qu’un autre moyen de transport, mais définitivement plus charmant.

Retour dans les hauteurs – précision quasi inutile à Valparaíso – dans les agréables paseos Atkinson et Gervasoni. Habiter ici avec cette incroyable vue doit être fort plaisant. Au bout du paseo Atkinson, point de M.Bean (haha), mais une oeuvre consistant en un mégaphone qui communique avec son jumeau sur le Cerro Concepcion. Ainsi, deux gosses communiquent sans efforts et font connaissance, les adultes, si peu spontanés, ne tentent pas l’expérience.

Mégaphones en vis-à-vis

Mégaphones en vis-à-vis

D’en bas, nous passons rapidement voir l’intérieur du « J Cruz » que nous retrouverons plus tard. De nouveau nous prenons un ascensor pour le Cerro Concepcion pour tester l’autre mégaphone. Surtout, on peut descendre d’un mirador en… toboggan ! Hadrien s’en donne à coeur joie comme de nombreux enfants.

Hadrien content

Hadrien content

Ensuite, après une ultime descente, nous prenons un bus pour Viña del Mar. Valentina connaît bien puisqu’elle vit ici. Le bus trace à vive allure jusqu’à la ville. Nous visitons d’abord une grande feria artisanale (où je déguste une brochette de fraises au chocolat) puis, un joli parc où se tient chaque année le fameux festival de Viña et, enfin, nous marchons jusqu’à un bar à l’ambiance mexicaine pour savourer les meilleurs mojitos de la ville en mangeant des tortillas. L’ambiance de Viña est très différente de celle de Valparaiso. Beaucoup moins populaire, moins authentique, c’est une station balnéaire ni plus ni moins. Ceci dit j’aime beaucoup observer les vacanciers paisibles, serviette sous le bras.

Déambuler des heures dans cette ville qui monte et qui descend nous a ouvert l’appétit. Les tortillas pour l’apéro n’ont fait qu’empirer les choses. Comme le ventre d’Hadrien supplie pour manger une chorrillana, Valentina décide de nous emmener dans un restau réputé. Retour à Valpo. Malheureusement ledit restaurant est à court de ce plat traditionnel porteño. La question est, comment est-il possible de manquer des principaux ingrédients de ce met diététique ? Autrement dit : de frites, d’oignons et de viande?
Qu’à cela ne tienne, direction un autre restaurant, le place to be de la chorrillana : le non moins réputé « J-Cruz ». Le lieu est très connu. Autant par les touristes que par les gens de Valpo. Son côté typique et kitch attire les foules. Les nappes, les chaises, les murs sont recouverts d’écritures. Depuis des temps immémoriaux, les gens écrivent leurs annonces, mots doux, conneries, blagues et états d’âme au crayon Bic. Les hiéroglyphes ont commencé à coloniser les murs puis les gens ont collé des photos d’eux ou de leurs proches. Si bien qu’on ne sait plus trop si l’on est dans une église, un musée, un journal intime, une brocante (pléthore d’objets kitchissimes) ou un restau.

Chez J Cruz

Chez J Cruz

Nous partageons donc un plat de chorrillana en écoutant de vieux chants populaires repris en cœur par tous les clients, chantant la bouche pleine de frites. Ça sent l’oignon, on mange gras, un vieux joue de l’accordéon : on adore. La soirée se termine le ventre bien rempli. Nous rejoignons notre petite auberge La maison de la mer à pas feutrés. Nous avions peur de déranger notre hôte car nous n’avions pas de clefs, et il pensait que nous lui avions posé un lapin.

Dans la rue de la Maison de la mer

Dans la rue de la Maison de la mer

Dimanche 16 février

Après un bon petit déj’, nous passons la matinée dans le jardin sur le site Work Away. Nous cavalons pas mal en Amérique du Sud et nous aimerions changer de rythme aux USA, nous poser pour apprendre, rencontrer des gens et découvrir des régions de façon plus approfondie. Nous partons ensuite nous promener dans le coin de la Sebastiana, une autre des trois maisons de Pablo Neruda.

La Sebastiana

La Sebastiana

Nous ne cherchons pas à la visiter puisque nous comptons voir celle d’Isla Negra, et nous nous contentons du parc public. La poésie est à l’honneur sur les murs de la rue avec des vers de Garcia Lorca. Les mots rythment notre descente jusqu’au musée à ciel ouvert. Deux différences avec les graffitis qui couvrent les murs de la ville. La première, c’est la présence de plaquettes donnant le nom de l’artiste ; la deuxième, c’est que les œuvres sont malheureusement vandalisées, ce qui arrive si peu dans la rue. On a beaucoup de mal à trouver toutes les peintures du musée, si bien que nous sortons par un coin délabré qui ne nous inspire pas vraiment. Rebroussant chemin, nous passons par des ruelles, des escaliers labyrinthiques accompagnés par un chien chasseur de chats. Nous passons par des coins relativement aisés, où les maisons sont neuves, de bonne facture et possédées par des étrangers. Ça tranche avec la baraque/squat ouverte aux quatre vents que nous avions vu tout-à-l’heure.

Pasaje Santa Margarita

Pasaje Santa Margarita

L’heure des provisions a sonné. Je n’ai envie de rien en particulier et choisir ce que nous allons mangé est un calvaire. Nous trouvons le réconfort dans un pot de beurre de cacahuète importé des États-Unis. Au menu ce soir : lentilles, pâtes et bien évidemment avocats, toujours délicieux au Chili, quelque soit leur provenance. Le mélange lentille-pâtes intrigue quelque peu Tamara et Vladimir, deux chiliens du sud avec qui Hadrien va passer la soirée. Moi je pars me coucher.

Hadrien raconte : Vladimir et Tamara mangent frugalement ce soir : saucisson, fromage et vin. Pour eux, venir en vacances au nord est coûteux, le sud étant plus pauvre. Pour leur niveau de compétence, leur salaire n’est clairement pas à la hauteur. Quand on sait que Jumaï et moi avons travaillé au SMIC pour partir 6 mois en voyage… Pour autant, en faisant un rapide calcul, il apparaît que notre budget n’est pas démentiel par rapport au niveau de vie d’un chilien moyen : 1200000 pesos chiliens pour 2 mois et 3 semaines de voyage, quand un salaire mensuel décent au nord est de 1000000 pesos chiliens. Comme souvent, nous en arrivons aussi au sujet de la cuisine. Cette fois, j’essaie d’expliquer la différence entre la mostaza – sorte de savora – commune au Chili et la moutarde de Dijon à proprement parler, quasi introuvable. En Argentine, la confusion est impossible puisque la savora s’appelle justement savora. Nous discutons ainsi de nombreuses heures jusqu’à nous rendre compte qu’après minuit, nous ne sommes pas sensés faire du bruit dans la salle commune. Tant pis !

Lundi 17 février

Le 17 février est un grand jour ! Nous nous réveillons de nouveau dans l’auberge Casa verde Limon et déjeunons de pain et beurre de cacahuète ! Nous faisons goûter la pâte à Tamara et Vladimir, qui ne parviennent pas à finir leur cuillère. Comme nous faisons du tourisme gastronomique (d’aucuns diront qu’on est juste des ventres sur pattes), nous filons juste après vers un restaurant pour fêter l’anniversaire d’Hadrien comme il se doit. Sur la route nous croisons Laure et Raphaël que nous avions rencontré à Bariloche, et ils sont dans le même hôtel que nous, à ceci près qu’ils ont l’annexe luxueuse. Ce ne sera pas la dernière fois que nous les croiserons. Il est déjà 13h et le restaurant que nous visions près de la Sebastiana est fermé, lundi oblige. Y compris sur la rue Almirante Montt beaucoup de restaurants restent clos et nous trouvons finalement une place dans un lieu assez chic mais très bon. Le credo du restau est de mélanger la cuisine européenne à la cuisine chilienne. Au menu donc : ceviche de poissons, poulpe, petits légumes savoureux et vin chilien.

Histoire de bien digérer, Hadrien retourne à l’auberge en courant, dévalant les pentes tel un puma afin d’arriver à l’heure au rendez vous skype avec la familia car nous sommes restés 4h à discuter autour de nos plats. N’ayant pas sa force et son courage (c’est surtout que c’est son anniversaire. Je le laisse gagner la course pour une fois), je fais une pause pour reprendre mon souffle dans une friperie.

Gâteau à distance, cadeau à retardement en marque-page, petits mots sur le site et album de Condorito (le héros de BD national chilien) : Hadrien est ravi.

Le soir nous retrouvons Valentina. Nous nous pointons devant le bar mais le vigile nous recale car nous n’avons pas nos cartes d’identités… Les chiliens sont paraît-il très stricts avec ça. Un petit aller retour à l’auberge, l’occasion de donner rendez-vous à Vladimir et Tamara, et nous voilà de nouveau devant le Coyote Quemado. Le bar porte bien son nom puisque sans passer par la case départ ni toucher 200€, nous nous enfilons un Sacrificio Maya. Charmant shot enflammé que nous adoucissons avec du Pisco pour les uns et des mojitos pour les autres. On cause de tout et de rien puis changeons de bar pour aller écouter un concert gratuit. Nous découvrons le Terremoto, savoureux mélange de glace à l’ananas et de vin blanc. Puisqu’on vous dit qu’on fait du tourisme gastronomique !!! Mais voilà déjà l’heure du départ de notre amie. Nous l’accompagnons volontiers parce qu’à la table voisine deux mecs bourrés et inintéressants – mais pas méchants – ne nous lâchent pas la grappe. Un peu sonnés par le tremblement de terre, nous rentrons ensuite nous coucher bienheureux.

Mardi 18 février

Notre but avant de rejoindre Santiago était de visiter la maison de Neruda à Isla Negra. Par mail, nous nous étions assurés qu’il n’était pas nécessaire de réserver, donc nous partons tard et arrivons là-bas comme des fleurs. Malheureusement, pour espérer visiter la maison il faut s’inscrire sur une liste d’attente et poireauter des heures en espérant qu’on nous appelle un jour. Les gens organisés arrivent tôt et reviennent 2h plus tard pour être appelés. Du coup nous partons faire bronzette face à l’océan Pacifique en attendant notre bus de retour pour Santiago. Temps splendide et spectacle naturel sur fond sonore des Red Hot, ambiance côte ouest, ça ne finit pas si mal.

Pacifique

Pacifique

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