Un air de bout du monde

28 Avr

Lo mejor de carnaval

Samedi 1er mars

•J• Le lendemain nous nous levons tôt. Pas question de faire des vieux os ici. Nous retraversons la rivière et la ville pour rejoindre la route qui mène à la quebrada. Nous avons l’intention de faire du stop jusqu’à Purmamarca. Il y a des embouteillages monstres, pas mal de concurrence et nous sommes trois ! Toute l’Argentine se rend dans la quebrada de Humahuaca pour fêter le premier jour de carnaval. Ici on déterre le diable une semaine durant. Alors, tout est permis : se marier avec n’importe qui et divorcer deux heures après, se barbouiller de peinture et de talc, s’asperger de mousse et surtout faire la fête, danser et picoler. Tous les villages du canyon fêtent cet événement qui attire pléthore de jeunes porteños. Nous sommes impressionnés de voir que les traditions et le folklore sont très présents. Jeunes et moins jeunes dansent sur de la musique folklorique toute la nuit et déambulent tous les jours dans les rues. Finalement, deux argentins de la capitale finissent par nous emmener jusqu’à Purmamarca. Visiblement, il ne fallait pas compter sur les milliers de convois locaux, saturés de passagers et en bagages, qui nous méprisent avec le sourire ou non. Nous sommes coincés dans les embouteillages pendant une bonne heure, serrés comme des sardines à l’arrière de la petite voiture de location. Dans Purmamarca, l’ambiance est entre la fête de village, la feria artisanale et le festival de musique. Les marchands étalent leurs bibelots, chapeaux, pulls d’alpaga à prix fort. Tout le monde ou presque porte une sorte de chapeau en feutre coloré, en forme de cloche. Fernando, Hadrien et moi faisons le tour des hospedajes et des campings. Tout est cher et/ou complet. Idem lorsque l’on cherche de quoi manger. Le prix des empanadas s’envole. On trouve quand même une gargote sympa dans la rue ou l’on s’empiffre de délicieuses empanadas à un prix tout à fait raisonnable. Nous retrouvons les deux argentins devant leur voiture afin de récupérer nos sac à dos qu’ils avaient gentiment gardé. Eux poursuivent vers le Chili, quand nous allons tenter le stop jusqu’à Tilcara, un village à quelques kilomètres de Purmamarca où se déroule le gros du festival.

Montagnes aux sept couleurs

Montagnes aux sept couleurs

Après 2km de marche sous le soleil avec 13 kilos sur le dos nous atteignons la route principale. Deux voyageuses à sac à dos reviennent tout juste de Tilcara et nous avertissent : le bled est blindé par la foule, et pour se loger c’est mission impossible. Au bord de la route, nous attendons une bonne heure sans que personne ne nous emmène. Même les bus nous ignorent alors qu’il est plutôt courant pour eux de s’arrêter n’importe où pour prendre des gens. Dépités, nous décidons, vue l’heure, de retourner au village. Et c’est reparti pour 2km, en montée cette fois. Sur notre chemin, deux types nous conseillent un camping à 35 pesos la nuit. Banco ! Mais d’abord, nos mirettes s’émerveillent sur la montagne au sept couleurs que nous avions ratée à l’aller. Au mirador, nous aidons trois motards – est-il nécessaire de préciser qu’ils sont brésiliens – à prendre une photo. Les trois gars font le voyage, par étape, de leur pays à l’Alaska, en passant par le nord argentin et quelques étapes par avion. Encore une fois, les motards vendent du rêve avec leur bécane et leur liberté. En cadeau, nous recevons d’hideux autocollants conçus par leurs soins. On ne peut pas être bon partout.

Vieux motards que j'enviais

Vieux motards que j’enviais

Nous finissons quand même par arriver et nous plantons la tente dans la poussière et le champ de cailloux faisant office de terrain. Miracle il y a de l’eau chaude h24 ! Le luxe. On est d’autant plus ravis qu’on nous dit qu’à Tilcara, se loger relève du défi. Prix exorbitants, lieux pourris et complets. Le hasard fait bien les choses. Plusieurs personnes d’ailleurs logent à Purmamarca et vont faire la fête à Tilcara. Après notre expérience de l’aprem’, on préfère rester là et profiter des festivités d’ici. Nous retournons manger dans la gargote du midi : salchipapas autrement dit, un mélange de frites géantes et de saucisse coupée en rondelles. Pas de quoi tenir toute la nuit mais ça nous requinque. Il y a plein de lieux dans le village ou s’organisent des bals plus ou moins traditionnels. Au programme musique live, attaque de mousse et danse ! Les petits diables sont richement déguisés. Impossible de voir leur visage.

Petit diable

Petit diable

Ainsi, tout est permis ! Nous nous faisons baptiser à grands coups de peinture (Hadrien a choisi ses couleurs) et de talc au sein du cortège qui prend fin. Ça chante des refrains qui rentrent tout de suite en tête, sur musique de fanfare et danse de foule déchaînée. Même dans un petit village comme Purmamarca, on sait faire la fête.
Nous finissons notre soirée sous un grand préau où joue un groupe bien énergique qui reprend visiblement des classiques puisque tout le monde chante. L’ambiance est géniale. Ça fait longtemps qu’on n’avait pas vu autant de mélange des générations s’amuser de la même manière. Ça boit du fernet coca ou de la Salta negra (une bière délicieuse, bien maltée) et ça danse hyper bien. Autant dire que les deux briques que nous sommes regardent avec envie les danseurs de tout âge. Ceux qui apprennent que nous sommes français tiennent absolument à ce qu’on boive avec eux ou qu’on danse. On a goûté à des mélanges étranges et dansé avec des gens aux yeux rougis et pas forcément stables mais c’était une soirée super. Très bizarre après tout ça de vous avouer qu’on s’est couchés avant minuit… Hadrien est resté écouter un concert improvisé au camping et a soigneusement noté le nom des danses et des instruments traditionnels.

Le bœuf de Purmamarca

|H| L’ambiance dans le camping est magique. Devant une petite baraque dédiée à de l’hébergement, une terrasse en ciment permet de se rassembler avec tables et chaises, sous l’œil complice des gérants. Au départ très calme, le lieu est animé par une chanteuse, un violoniste et un guitariste. À cela s’ajoutent, au fur et à mesure, des percussionnistes, un flûtiste, un joueur de charango (petite guitare traditionnelle bolivienne), un autre de siku (flûte de pan andine) qui connaissent tous les chansons jouées ou au moins les bases pour participer. Ma voisine de chaise (oui, nous sommes assis) partage avec moi et mon autre voisine son fernet/Fanta, et m’explique avec précision les différentes danses et chansons. Elle-même est prof de danse et exécute un rituel avec un homme. Il s’agit d’une variante de la cueca, au cours de laquelle, chacun leur tour, les deux participants séduisent l’autre avec des mouvements codés. La tradition jujeña tient davantage de la Bolivie que de l’Argentine, proximité géographique et ethniques obligent. Pour en savoir plus sur les danses comme cells de la saya ou de suri-sicuri, ce site fait un bon résumé.

Je fais aussi la connaissance de Violeta, mon autre voisine de chaise. Elle étudie le théâtre avec son copain (parti se coucher, comme Jumaï) à Buenos Aires. Les deux argentines s’entendent bien et discutent de mouvements sociaux étudiants. En Argentine, les études sont gratuites, certes, mais de nombreux problèmes de sécurité et de gestion apparaissent. Les deux parlent très vite et j’ai du mal à suivre leur conversation qui passe aux mouvements sociaux en général, en passant par Tupac Amaru.

Le lieu se remplit et, avec l’heure tardive et sûrement l’alcool, l’ambiance devient survoltée. Danses endiablées, jets de mousse et talc, le carnaval bat son plein ici aussi. Difficile d’avoir une conversation dans ce contexte, je pars me coucher avec plein de petites notes à partager avec Jumaï.

 

Carnaval, deuxième round

Dimanche 2 mars

|H| Pas question de refaire l’erreur d’hier. Cette fois, nous partons en bus du village à Humahuaca. Nous connaissons les horaires et, mis à part le fait qu’on ne peut pas acheter de billets, tout va bien : grand soleil et bonne humeur. Les bus en direction de Tilcara sont souvent pleins à craquer, et à moins d’avoir pu réserver de Jujuy, impossible d’acheter des tickets. C’est donc premier arrivé, premier servi, avec le risque que nous ne puissions pas entrer dans le bus. Encore une fois, la chance nous sourit. Je demande la confirmation de l’heure à une jeune femme, et elle nous vend son billet et celui de ses deux amis : ils prendront un autre bus. C’est donc parti pour un long trajet pour une courte distance. Les embouteillages près de Tilcara nous permettent de constater la foule que le carnaval y draine. La station service est saturée de monde, la ville entière est remplie à ras-bord. Nous faisons connaissance avec Thomas, Belge d’une trentaine d’années qui a tout plaqué pour partir en voyage seul. Petite particularité, il vient de la partie germanophone de la Belgique, qui a ses propres institutions. Encore un territoire litigieux, conséquence du traité de Versailles. Pour en revenir au bus, nous discutons aussi avec un argentin qui traverse la frontière bolivienne aujourd’hui même. Il va prendre un train de Villazon (ville frontalière bolivienne) à Tupiza, solution qui paraît tentante pour un chouette voyage qui ne coûtera, on l’espère, pas trop cher. À voir quand nous y serons !

Arrivés à Humahuaca, nous faisons la rencontre d’une brésilienne et d’un argentin en couple – pardonnez l’oubli des prénoms, tout cela se mélange un peu trop. Nous allons tous ensemble à la recherche d’un camping abordable. Le vent souffle fort et la poussière vole, il s’agit donc de trouver un lieu un peu moins aride que le précédent à Purmamarca. Pendant que Fer et notre nouveau camarade vont se renseigner de l’autre côté de la rivière, nous savourons du dulce de leche. Autour de nous, de nombreuses personnes ont fait fi des campings et ont planté la tente dans la rue même ; mais ils disposent, eux, de voitures pour laisser leurs affaires en lieu sûr. Les deux éclaireurs nous emmènent ensuite au camping le moins cher et le meilleur. Sous l’ombre des arbres et entre le crottin de cheval, nous serons à l’aise. Tellement à l’aise que le couple argentino-brésilien s’endort bien vite, pendant que nous trois allons visiter le coin.

Pluie de talc et mousse

Pluie de talc et mousse

Une fois de plus nous nous faisons arroser de talc et mousse. Je garde le sourire, sauf quand on m’en met sous le t-shirt. Dans notre situation, on ne peut vraiment pas se permettre le luxe de changer tous les jours de vêtements. Bon, la vie pourrait être pire, on trouve des empanadas pas chères dans une petite boutique qui vent à peu près de tout et n’importe quoi. Le petit monsieur qui tient boutique a déjà un accent plus trop argentin, on commence a mettre un pied en Bolivie. La cuisinière, elle, tente de nous vendre des livres de cuisine maison ; non merci, on a les crocs et qu’une seule hâte : manger ces empanadas. Même si elles ne font pas l’unanimité, je soutiens qu’elles sont dans le top 3 des meilleures que nous avons mangé jusque là. Notre estomac rempli, Fer et moi laissons Jumaï sur internet dans un bar et allons crapahuter sur la colline. Sur le point culminant du bled, des Japonais couverts de talc et ravis d’être là réalisent un film. À la lumière du crépuscule, le spectacle des montagnes colorées est splendide, et nous allons l’admirer d’un peu plus haut en montant sur le socle de la statue.

Rendez-vous devant le monument

Rendez-vous devant le monument

Coucher de soleil sur les montagnes

Coucher de soleil sur les montagnes

Foule sur les marches

Foule sur les marches

En contrebas, les gens festoient sur la dégringolade de marches. Au moment où nous y retournons, je veux saisir la photo d’un chien, mais il s’échappe du cadre ; j’ai de la chance, une gamine le retient.

La petite fille et le chien

La petite fille et le chien

Nous allons retrouver Jumaï au bar où elle est connectée à internet. Sympa l’ambiance, le prix du jus d’orange moins. Le Wi-Fi n’y marche pas, en plus, alors Jumaï a obtenu l’autorisation de se connecter à l’entrée de l’hôtel voisin, l’occasion de se faire de nouveaux copains. Elle discute avec eux du délicat débat intitulé « dans quel pays les femmes sont-elles les plus belles ? » Une fois toutes ses affaires réglées, nous rentrons tous les trois au camping en passant faire des courses. Au menu ce soir : bouillon de légumes agrementé de municiones (minuscules pâtes). Nous utilisons le réchaud-canette que j’avais fabriqué à El Calafate avec l’aide de Kévin, ainsi que la précieuse casserole de Fer. Enfin, le repas n’aurait jamais été aussi bon sans les cubes de bouillon. Comme l’ail et l’oignon, ça sauve un plat. Après nous être régalés, je fais la vaisselle avec la Mano Negra en musique de fond – quelques types ont une grosse sono dans leur voiture. Quant à nous, nous ne ferons pas long feu ce soir, il s’agit d’aller demain en stop à Iruya, un bled perché dans les montagnes.

 

Périple pour Iruya

Lundi 3 mars

•J• Nous quittons Humahuaca pour nous diriger encore plus vers le Nord et la frontière Argentine. Nous souhaitons d’abord faire un petit crochet vers Iruya, un pueblito perdu dans les montagnes. Nous avons décidé d’y aller en stop. C’était sans compter le manque d’empathie des habitants du coin qui, visiblement, n’aiment pas beaucoup les blancs becs comme nous. Fernando est parti quelques kilomètre devant nous. Nous ne savons pas si il a été pris ou non. Ce qui est sûr c’est qu’après trois heures d’attente au bord de la route et le bras engourdi nous n’avons pas avancé d’un pouce. Nous décidons finalement d’abandonner après avoir vu une famille de 7 nord-argentins se poster juste devant nous et attendre à peine 3 minutes avant d’êtres pris par une minuscule voiture de 5 places… Au bord de la route, des porteños de Buenos Aires attendent aussi depuis des heures. Eux nous disent carrément ressentir un certain racisme de la part des argentins de cette partie du pays.

La faute aux frontières sans doute, qui séparent les gens et leurs cultures d’origine. Nous retournons au village pour attraper un bus. Comme si ça ne suffisait pas nous mettons un temps infini à trouver le terminal. Une fois sur place nous patientons une bonne heure avant l’ouverture du guichet. J’en profite pour aller acheter de succulentes empanadas. Nous rencontrons sur place Matias, Jamie et Tracy. Le premier est argentin et a rencontré Jamie au Brésil. Jamie est irlandais et depuis 9 mois il travaille en tant que prof d’anglais à Buenos Aires ; il a habité un moment chez Matias mais ne parle toujours pas espgnol. C’est dans le cercle des enseignants d’anglais qu’il a rencontré Tracy, sudafricaine, en couple avec Matias. Pour un ultime voyage en Bolivie puis Pérou, ils sont inséparables. Comme ils suivent la même trajectoire de route que nous, ils seront nos compagnons de voyage jusqu’au Salar d’Uyuni, ce qui nous permettra de partager les frais du tour. Finalement nous embarquons pour Iruya. Dans le bus nous retrouvons Violeta et Kaio qui nous fournissent de la coca. L’ascension est splendide et nous traversons les nuages au sens propre.

Sur la route escarpée vers Iruya

Sur la route escarpée vers Iruya

Une fois dépassé le col, nous redescendons dans une jolie vallée verte avant de remonter de nouveau. À Iruya, Fernando nous retrouve et nous emmène dans sa bonne auberge, l’hospedaje Asunta. Il y a des super terrasses donnant sur le village et de petites chambrettes agréables. Finalement, Fer s’est fait emmener par un militaire puis une autre voiture. Il faut croire que, tout seul, ses chances étaient démultipliées. À Iruya nous passons notre temps à monter et descendre. Ça fait les cuisses et entraîne nos poumons fatigués par l’altitude.

Goûter dulce de leche panoramique

Goûter dulce de leche panoramique

Le village est tranquille et très joli avec ses ruelles pavées et ses montagnes alentour. À l’office du tourisme, la conseillère dissuade Hadrien de partir en train jusqu’à Tupiza. Trop cher, trop lent. Ce sera donc en bus que nous ferons le trajet. Nous passons la soirée avec des gens de l’auberge à cuisiner et discuter. Nous décidons de nous grouper avec Sheilla et Léo, voyageurs solos, pour faire la randonnée vers San Isidro le lendemain. Car Iruya, même sans voiture, n’est pas encore le terminus.

Les ânes et les chevaux votent aussi à Iruya

Les ânes et les chevaux votent aussi à Iruya

 

Jusqu’au bout du monde

Mardi 4 mars

Départ vers le petit village du bout du monde. La rando est super. Nous traversons la rivière une bonne vingtaine de fois. Nous rencontrons Gabriela et Laura, autant en galère que nous pour retirer et remettre les chaussures toutes les deux minutes.

Mise en scène par les Dieux d'Iruya

Mise en scène par les Dieux d’Iruya

Fer et un compagnon éphémère traversent la rivière

Fer et un compagnon éphémère traversent la rivière

Le long du torrentRoc rouge
PauseAu choix : mains coupées ou genoux trempés

Sur sa route, un habitant de San Isidro nous aide plus d’une fois sur des passages difficiles. Alors qu’on redoutait qu’il nous fasse payer, sa combine est plutôt de nous mener à son restaurant. Tous se laissent tenter, sauf Fer et nous deux, sur une recommandation dythirambique de Sheilla, qui est déjà venue plusieurs fois. Nous mangeons ce qui paraît être les meilleures empanadas (du monde !) au comedor de Teresa, avant d’aller nous étaler sur l’herbe pour une sieste réparatrice au soleil.

Fer et Sheilla sur les marches du comedor

Fer et Sheilla sur les marches du comedor

Petite fille privée d'internet

Petite fille privée d’internet : parents indignes !

Une petite fille en train de jouer avec le téléphone de Matias nous scie tous avec sa question surprenante à l’heure du tout virtuel: « c’est quoi internet? » Nous savourons ses mots précieux et profitons des derniers instants passés au bout du monde. Le guide officieux de l’aller a perçu le filon et nous propose de nous guider pour le retour, moyennant une grasse participation financière. Pas question pour nous de payer. Nous rentrerons tranquillement et gratuitement avec Gabriela, Laura, Sheilla et Fer, tandis que Matias, Jamie, Tracy et Léo, partiront avec le guide. Devant un précipice, nous profitons de la vue pour faire une photo de groupe.

De gauche à droite : Laura, Hadrien, Gabriela, Jumaï, Sheilla, Fer

De gauche à droite : Laura, Hadrien, Gabriela, Jumaï, Sheilla, Fer

TorrentSur les cailloux
À l'entrée d'IruyaL'homme au chapeau

Sur le chemin du retour

|H| La beauté de cette randonnée tient autant aux superbes montagnes qu’à la vie particulière qui se déroule sous nos yeux. Sur le chemin, nous croisons de nombreux habitants de San Isidro qui, pour s’approvisionner ou visiter leurs familles, ne peuvent compter que sur leurs jambes. Petits et grands, jeunes et vieux, personne ne coupe au chemin bordant le précipice. Être loin de tout, c’est peut-être le prix de la tranquillité. Pas fous, les habitants ont la télé par satellite, mais ils sont autonomes en nourriture. En témoigne les empanadas que nous venons de manger ; la patronne nous a donné leur secret : des ingrédients totalement locaux. Pourvu que ça dure…

Dans la cour de l’hospedaje, des vieux d’Iruya se sont réunis pour les festivités du carnaval. Coiffés de chapeaux, ils sont assis en cercle et bavassent en buvant des coups. Violeta et Kaio, qui ne sont pas allés à San Isidro mais aux collines voisines, ont pu en profiter. C’est quasiment la fin de la réunion et nous avons droit à une étrange musique, celle des cornes en spirale desquelles sort un son proche du cor, avec une variation incessante de trois notes. Sur ces sons, nous verrons les mêmes anciens danser en cercle, comme en transe, depuis une toiture du village. Car ce soir, il y a encore plus de monde dans l’hospedaje et Fer, Sheilla, Jumaï et moi n’allons pas faire à manger gratis pour quinze personnes une deuxième fois. Si à Cafayate l’énergie de groupe était parfaite, nous n’avons pas eu la même chance à Iruya. L’inertie ambiante nous mène donc à un repas simple dans la chambre, en compagnie de Violeta, Kaio, Gabriela et Laura. Ça tombe bien, ce sont nos préférés. En bas, dans la salle commune, nous avons déjà partagé beaucoup de maté avec beaucoup de monde, avec des conversations difficiles à suivre. La tranquillité de la chambre est bienvenue. Une fois les coordonnées échangées, chacun retourne à ses pénates pour un repos bien mérité. Demain, nous avons un bus très tôt et nous n’avons pas encore les billets.

 

Et nos chemins se séparent

Mercredi 5 mars

|H| Reglés comme des horloges, nous nous levons sans trop de mal pour le premier bus, à 6h. Je pars acheter les tickets au bureau, ouvert un quart d’heure avant le départ. L’heure arrive, mais nous ne voyons pas Jamie, Tracy et Matias. Les deux premiers arrivent enfin, mais pas le troisième, et ils n’ont pas de billet. Fer prend l’initiative, il court chercher Matias. Mais alors que le bureau était à deux minutes de l’arrêt de bus, les deux tardent à revenir, incapables de le retrouver. Bredouilles, ils finissent par acheter leurs tickets au conducteur : le dédale d’Iruya a encore fait des victimes.

Avec un bus si tôt, nous savons que nous avons de grandes chances d’arriver à Tupiza ce soir. Dès notre arrivée à Humahuaca, nous obtenons nos billets pour La Quiaca. Le départ doit être imminent, mais le bus est en retard et nous avons le temps de dire au revoir à Fer. Nous avons partagé un très bon bout de voyage avec lui. On espère le revoir à notre retour, un jour, à Buenos Aires !

Hasta luego Fer !

Hasta luego Fer !

Le bus est très moyen, mais on n’est pas à ça près. Jamie, gros buveur d’eau, doit souvent aller aux toilettes ; les chiottes condamnées du bus ne l’arrangent pas, mais ça ne l’empêche pas de dormir comme un bébé. À La Quiaca, il nous reste un peu de chemin à pied pour atteindre le poste frontière, situé sur un pont. Les formalités, bureaucratiques, ne sont pas trop longues. Au poste bolivien, les policiers glandent sévère en regardant un film ; c’est à peine si on nous regarde pour délivrer notre visa. La jumelle bolivienne de La Quiaca, Villazon, est bardée de commerces destinés aux argentins chez qui l’importation est très onéreuse. À un très mauvais taux, nous échangeons quelques pesos argentins contre des bolívars. Quelques centaines de mètres, et nous trouvons sans mal un chauffeur de taxi spécial qui fait la navette entre Tupiza et Villazon. Avec deux autres passagers, nous voilà partis à fond la caisse sur de la musique bolivienne. En route pour le salar d’Uyuni !

Salut l'Argentine

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