Deux goinfres en ville

13 Jan

Dulce de leche chez Volta

Ce qui nous a d’abord surpris à Buenos Aires, c’est l’échelle de la ville, difficilement représentable par un plan. Les rues ne sont pas immensément larges, mais immensément longues. Comme aux États-Unis, les rues ne sont pas construites de manière empirique, au fil de l’histoire, mais rationnellement, selon un quadrillage plus ou moins régulier. Plus ou moins, parce que certaines rues, comme la rue Honduras, zigzaguent. Ici, les gens ne précisent pas le type de voie avant le nom. À force de faire ce trajet à pieds, nous le connaissons presque par cœur.

Le quartier Palermo où nous logeons est tranquille et très agréable à arpenter. Il y a peu de monde, beaucoup de végétation et de nombreux promeneurs de chiens, (un métier disparu en France?) On pourrait assister à des échanges entre propriétaires et professionnels, de ce style : « la promenade s’est bien passée, kiki a été très sage » ou « toutou à fait caca mou, il faudra revoir son alimentation. »

Vendredi nous avons fait quelques sites conseillés par Julien que nous avions rencontré chez Léo. Sa copine est argentine et ils nous ont donné quelques bons plans pour bien manger et visiter la ville. En sortant par la station Tribunales, on a fini par trouver la pizzeria délicieuse de avenida Corrientes : Güerrin. Ambiance populaire, ça grouille de monde, les employés crient les commandes, zigzaguent entre les clients. Certains mangent seuls, sur des tabourets ou debout. D’autres ont davantage de temps et s’assoient dans la salle. On fait la queue pendant 3 minutes pour être servis : après avoir payé, un spécialiste de la découpe nous sert en mois de trois secondes! On n’a jamais vu quelqu’un couper aussi vite une pizza. Le geste est précis, rapide, et en 2 secondes nos parts de pizzas sont sur des assiettes. Et quelles parts ! Pour 28 pesos (3,5€ env) nous avons mangé comme des rois : deux parts de pizza et une epenada pour deux. Moins cher que le supermercado et tellement meilleur ! Au supermarché, le pain (bas de gamme) est à 5€ le kilo si ce n’est plus ! Ça donne envie de manger chez Güerrin tous les jours.

Corrientes y Güerrin

Après avoir englouti notre repas, nous partons manger une glace chez le très chic Volta. Nous tentons les glaces traditionnelles : dulce de leche (bien sucré et facilement écœurant) et sambayón (très spécial, goût d’alcool : marsala). Les glaces sont délicieuses, la texture parfaite et le lieu, bien qu’un peu trop épuré, est agréable avec sa terrasse ombragée. En plus, comme de nombreux latino-américains, chez Volta on est fan des Red Hot Chili Peppers, qui passent en boucle. Hadrien content.

Puis c’est reparti pour une longue marche jusqu’au quartier chic de Recoleta. On traine des pieds dans le cimetière, sorte de Père Lachaise local, en plus petit et moins végétal. |-| Pourquoi on visite les cimetières ? Parce que les tombes sont belles ? Ou plutôt parce qu’on aime les vieilleries, comme dans les brocantes ou les vide-greniers ? |-|

Tombe de Recoleta

On entreprend ensuite notre périple vers el Retiro, le terminal de bus pour acheter notre billet vers Iguazú. En chemin, on entre par hasard, dans l’antre de l’artiste ferroviaire, Carlos Regazzeto. Dans une ancienne gare désaffectée, lui et d’autres artistes exposent leurs œuvres et, de nuit on peut y boire un verre ou manger un bout. Ça sent drôlement bon d’ailleurs, dommage que ce ne soit pas le moment de manger. On rencontre Carlos, un gros type bourru aux cheveux gris frisés ; il parle français, et à habité près de Lyon pendant plusieurs annees. On ne sait comment il a pu amasser autant de déchets métalliques pour créer ses œuvres, qui vont du raptor robotique à la carcasse d’avion mélancolique. Le lieu sent bon le bordel créatif ; si ce n’est pas un squat, ça y ressemble comme deux gouttes d’eau.

El Gato viejo

Arrivés près de la gare, on ne joue plus. L’appareil photo rejoint sa pochette et on reste concentrés: l’endroit est agité. Le terminal de bus, Retiro, est surdimensionné pour nous, pauvres européens habitués au train à grande vitesse. Le car est le moyen privilégié de déplacement en Argentine. Pour acheter un billet, c’est ultra-libéral : on s’adresse à chaque guichet de compagnie de car pour obtenir le meilleur prix. Entente sur les prix ou simple réalité économique, on ne le saura jamais, mais le billet est cher : 765 pesos partout (environ 95€), juste pour l’aller ! Un peu dépités, nous ne savons pas quoi faire. On décide d’acheter quand même, et on ne sait pas pourquoi, mais on va au guichet le plus éloigné de l’entrée. Et là, surprise ! Le prix est plus bas. Peut-être que le prix fluctue en fonction de la tronche du client.

Ensuite, direction la maison par le métro. Un gamin seul vend des sortes de guides de soin à l’aloe vera. D’abord il les distribue aux voyageurs, davantage préoccupés par leur portable. Certains feuillettent, d’autres non, et au bout de quelques arrêts le gamin récupère sa marchandise, souvent sans compensation. Comme dans notre capitale, la misère s’invite dans les transports.

Une fois à « l’auberge-coloc », on discute sans regarder l’heure avec un ami de Renato qui vit visiblement ici. On parle des différences culturelles, on brise quelques mythes sur l’Europe, et essayons de parler politique, on compare les fonctionnements des deux pays…

Alejandro tombe des nues quand on lui dit qu’en France il existe aussi des gens qui font la manche ou dorment dehors. Lui s’imaginait que l’Europe ne connaissait pas la pauvreté. Cette image est, semble t-il, largement répandue par les médias et le gouvernement argentin désireux de se rapprocher encore et toujours de l’Europe.

Il n’est pas facile de parler de sujets pointus dans une langue qu’on ne maitrise qu’à moitié. Régulièrement, un autre participant s’invite dans la discussion: Google trad! Si l’accent de Renato, qui est chilien, est bien plus clair, celui d’Alejandro en revanche est un peu plus dur à déchiffrer.

Après quelques bons conseils sur notre itinéraire chilien prodigués par le patron, chacun retourne à son traintrain. On se fait des pâtes à la sauce tomate et eux regardent une télé novela.

Jeunes baigneurs de 9 de Julio

Premières impressions

10 Jan

image

Premier jour à Buenos Aires, après 14 heures d’avion pas si mal (bons repas, bon service, sièges corrects et films à volonté) mais pas reposantes. En arrivant, on prie pour que nos bagages arrivent. Il faut dire que le bagagiste de Roissy nous a un peu fait peur en nous disant que les sacs avec cape de pluie mise – c’était notre cas – étaient souvent perdus, la faute à une manutention mal aisée.

Pensant bien faire, nous allons au guichet des « remises » (en español), où nous réservons un billet de remis. Mais arrivé au stationnement, il s’agit non pas d’un taxi, mais d’un car. Et quel car ! Ici en Argentine, les fauteuils sont LUXUEUX ! Larges, confortables, permettant de s’allonger aisément. Avec un car de ce style, nul doute que nous dormirons bien entre Buenos Aires et Iguazu !

La suite est moins confortable, puisque, comme c’est un car, il s’arrête à une gare routière au Nord est de la ville. Nous décidons de prendre le métro et trouvons rapidement. Mais une fois à Bulnes, notre arrêt, il reste encore beaucoup de marche pour atteindre l’auberge. On n’est pas perdus, mais on demande quand même notre route – ou les habitants nous aident spontanément. Ainsi, un drôle de bonhomme édenté et analphabète, assis sur les marches d’une église, nous conseille de passer la porte de l’édifice religieux pour demander de l’aide. Un peu après, un suisse qui vit là deux mois par an nous indique une fausse direction sur son iPhone en confondant Lavalle et Lavalleja.

On finit par trouver, une voisine de l’auberge qui nous confirme qu’elle existe bien, malgré l’absence totale de devanture. C’est Pierre qui nous ouvre, un français qui vit ici depuis 3 mois. À 6€/jour, on comprend pourquoi !

Vous êtes venus avec le guide du routard ? Ça a changé de propriétaire, Renato est en train de finir les travaux.

L’auberge n’est pas officiellement ouverte mais les « routards » sont accueillis à bras ouverts.
Le lieu est très joli, et après une douche, Renato le « patron » nous fait visiter. Ça ressemble davantage à une colocation qu’une auberge, tant l’ambiance est accueillante.

Le gros camion devant l'auberge

On se décide à sortir après avoir terrassé une bouteille d’eau fraîche. Il fait chaud, tres chaud, et selon Renato, à Iguazú ce sera encore pire ! 50 degrés et pas de moyen de se baigner, mais une amie à lui a une bonne astuce. On testera ça sur place.

Notre première excursion dans la capitale semble irréel. Ce n’est pas un rêve, nous sommes bien en Amérique ! Les similitudes avec notre chère Europe latine sont nombreuses, tant et si bien qu’on se sent chez soi. Quelques signes nous rappellent la réalité sociale du pays : on croise des glaneurs de poubelles à sac à dos ou énorme carriole (à Paris aussi, il y en a, cela dit) ; devant les magasins, les agents de sécurité fleurissent et protègent les richesses.

Nous faisons de très bonnes rencontre avec les habitants, qui nous abordent volontiers comme ce vieux bavard qui nous parle de l’architecte de la banque brutaliste. Tant bien que mal nous tentons de comprendre ses traits d’humour.

Sur la Plaza de Mayo, nous interrogeons l’un des activistes qui luttent pour la reconnaissance des universités libres et gratuites du pays – et, disons le franchement, à forte coloration « anarcho-gauchiste ». Deux types font la grève de la faim, et par cette chaleur on ne sait pas comment ils tiennent depuis 10 jours. Cristina Kirchner, l’actuelle présidente de la  » Nation argentine » qui succède à son mari est pointée du doigt et sommée de prendre des décisions rapidement.

Révolutionnaire sur la plaza de Mayo

Autre lutte, perdue d’avance et silencieuse, celle du dernier bâtiment industriel de Puerto Madero, port reconverti en zone de bureaux et quais à bars (qui a dit « hangar à bananes » ?). Cet endroit résonne avec nos villes européennes, où tout opportunité immobilière est bonne à prendre. Ici cependant, « l’architecture » n’a fait aucun cadeau au patrimoine industriel. Aussi, le silo en cours de démolition se pose comme le dernier survivant à la rénovation. Dans le coin, quelques curiosités, notamment le superbe pont « de la mujer » par Calatrava :

C’est un quartier féministe, toutes les rues ont des noms de femmes.

– Renato –

Le silo esseulé

Puerto de la mujer

De l’autre côté du pont, une sculpture affreuse en hommage à la reine des Pays-Bas, financée par les entreprises les plus riches – et les plus pourries – des Pays-Bas : Unilever, ING direct, Shell, ils sont tous là. On ne voit pas bien quel est l’intérêt de chacun dans cette histoire, tant la réalisation est ennuyeuse à mourir.

De retour à l’auberge, Jumaï pique un roupillon et on a accès à internet. On vous fait donc de gros bisous de Buenos Aires.

Regard d'un cycliste

Tout près du départ

8 Jan

Première étape atteinte!

Ca y est nous avons enfin le plaisir de poireauter dans notre salle d’embarquement de Roissy CDG! Notre premier défi étant d’écrire un article en moins de 7 minutes, stressés par le compte à rebours des 15 minutes gratuites. On les renouvelle avec plein d’adresses mails, mais le temps en lui même est trop court pour dire à quel point nous pensons à tous ceux que nous laissons ! Frère, pères, mères, grand-mères, grand-pères, tantes, oncles, cousin-e-s, amis, etc. Merci d’avoir été là avant notre départ !

On pense à vous très très fort, on a le coeur lourd mais maintenant, on ne peut plus reculer !

A très vite sur le site, par mail, etc.