Sur la route 40, deuxième acte : vers Bariloche

11 Fév

Feu de camp

Lundi 3 février

Hier, en arrivant, il n’y avait personne dans le bureau du camping. Mais aujourd’hui on est lundi. Passera? Passera pas? Hadrien et moi devenons transparents et partons donc du camping en espérant que personne ne nous coure après.

Dans un voyage, il y a aussi des jours où on est de sale humeur. Dommage pour Hadrien, c’est mon jour ! Chaque mètre me paraît être un calvaire et je suis persuadée que rien ne va marcher comme il faut. De toute façon, le stop c’est nul, il fait froid mais il y a trop de soleil, j’ai pas envie de marcher, ni de m’asseoir. J’ai faim mais je ne veux pas de nos victuailles. Bref… L’EMMERDEUSE !
Nous allons donc nous renseigner des horaires et des prix des bus vers Bariloche. Il faut attendre jusqu’à 19h. Il est 11h. Je suis prête à rester assise dans la gare routière toute la journée mais Hadrien me convainc d’essayer le stop. Au bord de la route, je tends le pouce en faisant la gueule et sans grande envie mais la première voiture qui passe s’arrête et nous embarque. Adrian, alias Paico, nous emmène jusqu’au croisement de la route 40. Il parle aussi vite qu’il roule. On a compris qu’il aidait son fils pour livrer le courrier, qu’il travaillait dans une boulangerie en étant ambulancier mais qu’un jour il n’y avait plus de pain. D’où son surnom… Hmm voilà ! (Après vérification sur internet, le paico est une plante contre les coliques). Tout s’éclaire !!! Ou pas.

Donc après cette discussion enrichissante, nous poireautons 2h au milieu de nulle part (on commence à avoir l’habitude) jusqu’à ce que Manuel et sa fille Valentina s’arrêtent ! Ils sont chiliens, reviennent du parc Torres del Paine où ils passaient des vacances et retournent à Valparaíso. Voilà ma raison pour arrêter d’être de mauvaise humeur. On roule à toute allure dans un gros 4×4 Mitsubishi sur les routes de ripio (graviers) en écoutant Neil Young. Je remercie Hadrien de m’avoir poussé au c**. La conduite de Manuel est bien sportive. Il dépasse quiconque va à moins de 100km/h. Grosse explosion de joie non contrôlée quand nous doublons les deux allemands et leur camping car qui, visiblement, n’apprécie pas la route accidentée. On va tellement vite qu’on ne sait même pas si ils ont vu notre petit coucou narquois. Les pierres volent dans tous les sens, percutent le pare-brise du Mitsubishi et la poussière jaune entre dans l’habitacle et colonise nos narine, notre bouche et nos cheveux qui, désormais, tiennent tous seuls. C’est vraiment le voyage en voiture le plus cool ! Un peu de super glue sur les impacts et on repart. La route à perte de vue et toujours guanacos et nandous au milieu du vide patagon. Manuel nous explique qu’il partage ses 3 semaines de vacances entre ses deux familles. Il passe chaque été 1 semaine et demie avec Valentina, qui a notre âge. Tous les deux parlent un peu français. Manuel a vécu à Montréal et Valentina a choisi de l’étudier à l’université. Nous sommes tour à tour professeurs ou étudiants. Ils nous font découvrir la musique qu’ils aiment et il y a vraiment de tout : Charlie Garcia, Nicole, Los Prisioneros, Silvio Rodriguez,… Et des groupes plus internationaux (Carla Bruni…?).

Nous avions prévu de nous arrêter à Esquel pour visiter mais la route en leur compagnie est tellement chouette que nous décidons de poursuivre jusqu’à El Bolson. Nous quittons (enfin) peu à peu les étendues désertiques ! Il y a des arbres ! Des arbres ! Nous nous dirigeons vers la « Suisse argentine ». Dès que nous posons des questions à Manuel sur l’endroit où il ont prévu de dormir ou manger, sa réponse est toujours la même: « je ne sais pas, on va voir » (en français). Nous décidons d’adopter cette philosophie pour tout le reste du voyage. (Déjà qu’on était pas trop stressés…)

Du coup nous nous arrêtons à El Bolson, un village de hippies, sans trop savoir ce qu’il s’y passe. Dans une station service, Manuel fait la chasse aux bons restos. Nous allons finalement manger à La Lola. Gnocchis à la truite et au pesto (et à l’huile car ici ce n’est pas accessoire) pour les filles et grosse viande bien épaisse pour les « autres ». C’est l’occasion pour nous de les inviter à manger, même si on ne pourra jamais assez les remercier d’avoir croisé notre chemin. Finalement Manuel et Valentina veulent visiter la feria artesanal de demain. Nous allons tous nous poser au camping, plein d’affiches pour des cours de yoga, de clown et de messages prônants le végétarisme. Nous nous mettons au diapason: feu de camp, marshmallows (malvaviscos ou nubes) grillés et surtout, concert privé d’harmonica par Manuel.
On a passé une super soirée.

Feu de camp

Mardi 4 février

Visite du marché artisanal et dégustation d’empanadas. Nous déambulons entre les cosmétiques bios, les confitures maisons, les mandalas en laine et les dessins de gnomes (au secours ! J’aurais préféré que cette manie de dessiner lutins et farfadets ridicules resterait en Bretagne !) puis reprenons la route.

La route est belle ! Nous arrivons à San Carlos de Bariloche par un quartier qui détonne vraiment avec la description du routard. Ce n’est pas la petite ville proprette avec ses chalets en bois et ses saint-bernard qui défile sous nos yeux mais la décharge à ciel ouvert et les quartiers plus pauvres. On est loin du côté Disney de Bariloche.

Manuel nous dépose dans la rue touristique de la ville. Il faut encore dire au revoir. Mais cette fois c’est un peu différent, Valentina nous a fait promettre de la prévenir quand nous arriverons à Valparaiso, ou elle vit. Nous allons nous revoir. C’est sûr ! Une dernière photo, une dernière accolade et direction le camping !

Valentina y Manuel

Sur la route 40, premier acte : Perito Moreno

11 Fév

Route 40, desertiaue

Dimanche 2 février

Hier, comme nous n’avons pas vu Silvio et Ivana, nous ne savons pas à quelle heure ils partent. Au matin pourtant, Ivana vient nous prévenir (nous avions ignoré la sonnerie du réveil) qu’il nous reste quarante minutes avant de partir. C’est la première fois depuis 3 semaines qu’on a une telle pression temporelle. Maintenant, on peut le dire : on sait remballer toutes nos affaires en trente minutes. Ça peut servir en cas d’attaque de raptors de l’espace armés de microfusils lasers.

Ainsi commence notre trajet sur la route 40. Pour la Peugeot 206 de Silvio, c’est de la torture. La partie asphaltée de la route est minuscule, le reste c’est du gravier (ou devrais-je dire, des gros cailloux). Nous n’allons pas vite, l’occasion de discuter avec nos chauffeurs. Tous deux sont enseignants à l’université, lui en technique de cinéma, elle en dramaturgie. La discussion est nourrie. Nous buvons un bon maté en écoutant de la bonne musique. Tous les deux ont voyagé dans de nombreux pays du monde : Chine, Inde, Japon, Espagne, France.

Le couple nous dépose à Perito Moreno. De la station service nous pensons pouvoir rejoindre rapidement le camping. C’est sans compter la grande précision des chabitants de la ville. Cinq personnes interrogées, cinq itinéraires différents, jamais le bon : on a l’impression de devenir dingues. Soit les gens ne connaissent pas leur bled, soit ils nous baladent sciemment, soit quand on nous indique à droite il faut comprendre à gauche. Toujours est-il qu’un jeune homme à casquette finit par nous fournir la meilleure explication.

Le camping est plutôt agréable et nous nous empressons de nous installer avant de faire à manger. Nous avions eu le nez fin en ne mangeant pas notre réserve. Ici, tout et fermé le dimanche. En donnant un reste de savora, on commence à discuter avec trois argentins : Sol, Celeste et son copain (dont le prénom ne nous revient pas). Les trois étudiants vont dans la direction inverse de nous, donc vers le sud, et viennent de Buenos Aires. Peu après la fin de notre repas, ils nous invitent à manger un plat de gnocchis à la sauce tomate. Bon plan : il est possible d’acheter des kits pour faire des gnocchis soi-même, et c’est plus économique. Avec le copain de Celeste, étudiant en architecture, nous commençons à parler de Le Corbusier et des unités d’habitation. Nous aurons plusieurs occasions de discuter du cas difficile et à plusieurs égards unique au monde des banlieues françaises. Nous nous accordons à dire qu’il aurait fallu plus d’unités d’habitation et moins de préfabriqués, plus de qualité et moins de médiocrité.

En rencontrant tout ces gens charmants, d’Argentine et d’ailleurs en Amérique du Sud, nous ressentons toujours le regret de ne pas pouvoir dire : « quand vous viendrez en France, venez nous rendre visite, » parce que la plupart des gens que nous rencontrons ne peuvent pas s’offrir le billet d’avion pour traverser l’océan. Et s’il n’y avait que ça…

Et puis il y a les gens désagréables, heureusement rares, qu’on ne risque pas d’inviter. C’est le cas de ces deux allemands qui voyagent en camping car et qui suivent visiblement la même route que nous (ils étaient au même camping à El Chalten). Après avoir parlé une bonne heure en espagnol, je bricole très mal un allemand mâtiné de castillan – un calvaire – pour leur demander de nous emmener davantage vers le nord. Les deux types ne me mettent pas en confiance, ils me méprisent même. D’abord ils invoquent le fait de ne pas avoir de place à l’arrière de leur voiture ; puis très vite ils nous font comprendre qu’il y a « beaucoup d’auto-stoppeurs sur la route » et que « prendre le car, ça ne coûte pas cher, seulement 100$. » Clairement, ils ne nous aiment pas, ça tombe bien c’est réciproque. On part se coucher, dépités d’avoir essuyé une telle défaite. Demain, on tentera la bonne vieille méthode du pouce levé.

Stop sur la route 40

Au détour de la rivière

7 Fév

Theodore, Simba et Cerro Torre

Mercredi 29 janvier

Le 29 janvier, nous prenons donc la route pour El Chalten. Pendant le trajet, Hadrien dort profondément et rate peut-être la seule occasion de voir le Fitz Roy débarrassé de son essaim de nuages. Nous faisons un arrêt au centre des visiteurs puis, allons planter la tente au camping El Relincho. C’est le paradis. Une rivière, des montagnes enneigées et des chevaux. Voilà notre tableau au réveil. L’ambiance ici est assez différente de celle d’El Calafate. On a quitté l’agitation d’une ville sur-touristique pour retrouver la quiétude d’un village ou se concentrent les amoureux de la randonnée. Ça reste un lieu très touristique; proximité du mont Fitz Roy oblige. Oublie-t-on toujours le mont Saint Exupery ?

Jeudi 30 janvier

Le lendemain nous nous réveillons vers 9h. Hadrien doit faire des courses et je dois préparer les sacs. Nous partons deux jours en randonnée dans le parc national des glaciers. Comme d’hab’ nous sommes à la bourre sur notre timing. Tant pis, c’est les vacances. De toute façon nous n’avons que 6h de marche. La première partie est plutôt tranquille. Le sentier va jusqu’au campement Poincenot, le seul endroit ou les randonneurs peuvent planter leur tente. Hadrien se tape gentiment les 12 kilos de matériel pendant que je prends des photos !

Tintin au Tibet

Nous plantons donc notre tente parmi les autres et après un bon plat de pâtes froides nous entamons la deuxième partie. Sur le chemin, nous rechargeons notre bouteille d’eau à meme la source, le bonheur. Le but étant d’atteindre la Laguna de los tres. Nous hésitons quelques minutes devant le panneau DANGER qui explique qu’à partir de là, mieux vaut être un marcheur expérimenté. Des gens « normaux » descendent. On y va. Le chemin grimpe dur. Très dur même. On ne sait même pas vraiment pourquoi on en bave. Dès que je croise quelqu’un, j’espère en mon fort intérieur qu’il me dise que la vue est sidérante. Juste pour être sûre que je ne suis pas en train de mourir de fatigue pour rien.

Bientot la laguna

C’est incroyable le nombre de gens qui font de la randonnée habillés avec classe, l’air frais et détendu, pas une mèche de cheveux qui dépasse de leur bandeau en polaire (un bandeau en polaire !),le sac, la gourde et les bâtons dernier cri… Et moi je souffle comme une génisse (je ne sais pas si cette comparaison est très imagée mais je l’invente pour l’occasion), je ressemble au bonhomme Michelin avec la veste de Barbie patinage artistique, je ne me suis ni lavée, ni coiffée depuis 2 jours et, je suis rouge vif (oui, en plus d’avoir très chaud, j’ai des coups de soleil !). Donc je hais les suédoises, les allemandes et les israéliennes sexy même après 400m de dénivelés en 1h.

Laguna de los Tres

Pourtant, le jeu en valait la chandelle. Je n’ai rien vu d’aussi fou ! Les rafales de vent vous font décoller du sol (observer paisiblement les glaciers et les lagunes serait bien trop facile). Le soleil commence à décliner. Le temps de boire une gorgée dans l’eau ultra pure de la lagune et il faut déjà redescendre. Ce n’est pas plus facile. La neige s’est mise à tomber, le vent s’est levé. Les genoux trinquent.

Au camping Poincenot, c’est le moment du repas froid. Un sandwich exceptionnel aux lentilles et mortadelle tient au corps : on le baptisera le Chalten. La nuit n’est pas des plus reposantes. Malgré nos gros duvets il fait vraiment froid. Du coup, on se lève à 8h pour entamer le retour, soit environ 7h de marche. Nous avons laissé la tente à Poincenot le temps d’aller voir le glaciare Piedras Blancas. Rien à voir avec le Perito Moreno mais de bon matin le chemin est paisible.

Le sentier qui retourne à El Chalten est bien plus facile. C’est pas de refus après l’ascension de la veille. A un moment donné, nous avons entendu un bruit très significatif. Nous avons juste eu à lever la tête pour apercevoir le pájaro carpintero (pic vert) jeter sa tête contre le tronc. On est bien restés 1h à l’écouter faire des trous dans les vieux arbres garde-manger.

Pivert bien planqué

Nous passons près des lagunas madre y hijas, observons les sangsues (il ne m’en fallait pas plus pour m’enlever toutes les envies de baignade dans l’eau turquoise) et surtout, les traces de pas d’un Huemul. C’est un cervidé en voie d’extinction très difficile à apercevoir. On a aussi raté le puma. Mais on a pu voir la Laguna Torre. Encore une petite merveille glacée ! On est restés un bon moment là haut à observer les minis icebergs et à se faire décoiffer par le vent. À l’abri d’un mur en pierres empilées, nous dégustons le sandwich du jour, le Torre (salade, poivron, jambon et savora). Peu après la famille de Nestor vient s’abriter à nos côtés et nous discutons de tout un tas de choses. Une photo souvenir avec le drapeau du club local (Nueva Chicago, club porteno de troisième division), et nous repartons sous un vent furieux. Les derniers kilomètres de sentier sont les plus durs, comme d’hab !

Laguna Torre

Bella vista football club

Samedi 1er Février

Journée de GLANDOUILLE ! On a quand même fait une balade d’une heure aller retour pour se donner bonne conscience. (Après avoir dormi 15h de suite). Sans commentaire. On a vu une petite cascade et on est rentrés dormir non sans avoir laissé un petit mot à Silvio et Ivana, qui nous ont proposés de nous emmener le lendemain jusqu’à la ville Perito Moreno. Au départ, c’est Kevin et Émeline qui les ont rencontrés sur la route du glacier Perito Moreno. Mais comme nos deux compères s’en vont faire du woofing dans une estancia, ils nous offrent la place dans la voiture. (La galanterie de l’auto-stoppeur!) Mais on ne pense pas preparer nos affaires sur le moment, et nous endormons bein vite…

Vue sur El Chalten

Rencontre avec Perito

7 Fév

Theodore et Simba

Samedi 25 janvier

Cette fois, ce n’est pas un policier qui nous amène au croisement de la route 3. C’est Carlos, un bolivien qui habite à Puerto Santa Cruz depuis 20 ans. Nous n’attendrons pas très longtemps avant d’être pris en stop par Rolando, camionneur chilien qui va nous emmener juusqu’à Rio Gallegos. Loin de chez lui, il prend la route pour des cycles de 3 mois. Il n’aime pas tellement l’Argentine. D’ailleurs il ne mange que les réserves que sa femme lui a préparé. S’il nous a pris, c’est parce que nous sommes français ; il s’est déjà fait voler par deux passagers, et visiblement de nombreux escrocs font du stop. Comme quoi le danger est mutuel, et les mauvaises rencontres peuvent toujours arriver. La discussion est riche, même si nous ne comprenons pas tout. Rolando parle excessivement vite et mâche les mots. Politique, retraites, salaires, nous couvrons des sujets sérieux et parfois complexes. Comme presque partout, les politiques se moquent du peuple chilien en promettant de meilleures conditions de vie. Il nous explique que les législateurs ont mis deux ans pour, au final, ne pas trouver d’accord sur l’augmentation des salaires, mais qu’il leur a suffit de deux heures pour augmenter les leurs. La présidente, Michelle Bachelet, reçoit peu d’éloges. D’après notre chauffeur, seulement 50% de la population est allée aux urnes.

Avec son salaire correct (équivalent à environ 1400€), Rolando parvient à payer les chères études de ses deux enfants (21 et 23 ans, l’un en droit et l’autre en psychologie) et assurer sa vie quotidienne ; son aînée, 30 ans, a quitté le foyer et travaille. Là où il n’a aucune certitude, c’est sur sa vie de retraité. L’état lui ponctionnera un tiers de son salaire actuel, et d’après lui il sera alors très difficile de vivre convenablement. Beaucoup de personnes âgées mendient ou meurent de faim : une fois payées les charges et le logement, il ne reste souvent plus rien. Nos retraites en France paraissent mieux, mais c’est sans compter tout ces petits vieux avec le minimum vieillesse qui croupissent dans nos maisons de retraite. La détresse sociale n’a pas de frontière.

Nous ne voyons pas le temps passer tant la discussion est passionnante. À la fin, arrivés au sujet gastronomie, Rolando nous offre un fond de confiture de cerises maison (on vous en donnera des nouvelles !). Il nous laisse non loin de Güer Aike, au croisement entre la route 3 et 5. Le vent souffle sans discontinuer à une vitesse phénoménale. Je me mets en position de contre et pense aux héros de La Horde du contrevent, livre passionnant que je lis en ce moment. On bouffe du vent comme jamais, et on n’a encore rien vu !

Monotonie patagonique

De longues minutes s’enfilent, peu de voitures et zéro réussite. À côté de nous, un panneau fait maison est accroché sous un panneau officiel. Il dit : « Llevada los mochileros al Calafate. » (« Prenez les [autostoppeurs] qui vont à El Calafate. ») Ça n’augure pas vraiment du bon : cela doit être l’œuvre d’autostoppeurs désespérés de ne pas être pris. Pourtant, au bout d’une demi-heure dos au vent, une voiture s’arrête. Miracle ! Elle nous emmène directement à El Calafate. La voiture est luxueuse : grosse Dodge familiale (voiture américaine, pour les incultes), sièges confortables ; ventilation et lumières pour tous les sièges, même au troisième rang ; écran escamotable. Amalia conduit, et c’est grâce à l’une de ses deux filles à bord que nous avons été pris. Amalia est architecte à Rio Gallegos (maisons et projets publics), et toutes les trois vont voir son beau-frère qui gère trois restaurants à El Calafate. On nous offre le maté en écoutant de la soupe romantique (A ti me reste encore en tête) puis de la soupe américaine (Miley Cirus & compagnie). Nous avons même droit à un remix house de Ella elle l’a. Au moins les choix musicaux sont pleinement assumés ! Amalia nous propose de venir gratuitement au bar de glace que son beau-frère tient aussi, mais il lui fait comprendre au téléphone que ce ne sera pas possible – tant pis. Amalia me montre une revue d’architecture argentine quelle vient de découvrir. Il s’agit de maisons en « country », soit des communautés fermées pour argentins privilégiés. Quelques projets retiennent mon attention, mais l’idée même de villes fermées me rebute. Pas de contexte, pas d’histoire ou aspect social mis en valeur : ces maisons apparaissent comme des objets fermés posée dans un environnement fermé. J’apprends que ces « country » n’existent pas en Patagonie, beaucoup plus sûre que le nord du pays, aussi Amalia ne fait pas de projets dans ce type de contexte. À l’arrivée nous avons droit à un tour de l’ensemble des environs, en passant par la maison de vacances de Christina Kirchner, la présidente ; il paraît qu’elle possède une bonne partie de la ville.

Une fois notre tente installée, nous partons en quête de l’office du tourisme puis d’un bon endroit pour manger ce soir. Sur le chemin nous croisons Émeline et Kévin, ils sont arrivés la veille et sont dans le même camping que nous. Leur route a été plus rapide grâce à leur chance à Camarones. Ils ont dû cependant dormir à Comodoro Rivadavia et prendre un bus sur le chemin.

La ville d’El Calafate est la plus touristique que nous ayons vu depuis le début de notre voyage. Les restaurants et magasins d’habits de montagne remplissent la majorité des emplacements. Il y a même un casino pour s’amuser entre deux virées au glacier. Les bâtiments sont couverts de bois pour donner un style chalet de montagne ; les lieux publics s’en tiennent à la portion congrue. Pour autant, on ne se sent pas si mal dans cette ville et on prend rapidement ses repères pour faire les courses ou simplement se balader.

Parmi toutes les adresses du routard, nous finissons par choisir le restaurant le plus éloigné du centre : Pura vida. Par rapport aux prix du reste du pays, c’est assez cher (80 à 110 pesos argentins le plat, soit 8 à 11€) mais pas tant que ça vis-à-vis des autres adresses d’El Calafate. Et surtout quand on voit les quantités servies ! Jumaï prend une demi-courge remplie de légumes et viande d’agneau, moi une sorte de tourte d’agneau aux olives. L’ensemble est tout bonnement délicieux, original et suffisant pour quatre bons mangeurs – nous emportons la moitié de mon plat pour le lendemain ! Dessert et pain sont aussi parfaits que le reste, sans parler de l’ambiance décontractée et un peu hippie du lieu. Une adresse à retenir pour qui passe par là, n’oubliez pas d’emporter les restes si vous n’avez plus faim (pain y compris).

Dimanche 26 janvier

Nous passons la matinée à roupiller et ne rien faire. Comme le Perito Moreno est assez loin, nous réservons notre journée de demain pour aller le voir. Cet après-midi, nous faisons un tour par la réserve municipale de El Calafate, au bord du Lago Argentino. Selon nous, c’est une visite à ne pas manquer sur place. Le paysage est superbe, mais on peut surtout y voir énormément d’oiseaux. Les flamands roses ne sont malheureusement pas très visibles, par contre les nombreux rapaces, canards, et autres piafs se montrent volontiers de très près. La flore est aussi à l’honneur, avec des espèces endémiques et d’autres plus connues en France comme le pissenlit ou le roseau. La visite est bien faite avec de nombreuses indications, pertinentes selon la position des nids ou des plantes à observer.

Reserve municipale

Oiseau en vol

Decollage de rapace

Le soir, nous faisons notre premier asado nous mêmes au camping. On a pris un morceau de viande conseillé par un argentin au supermarché. Le barbecue est laborieux à mettre en place, d’autant plus que nous n’avons ni charbon ni buches ; je découpe des morceaux de bois près de l’étang du camping. À minuit, après 3 heures de patience, nos patates sont cuites et nous mangeons le tout un peu à l’arrache. Le reste sera pour le pique-nique de demain.

Lundi 27 janvier

On nous a prévenus : faire du stop pour aller au Perito Moreno est presque impossible. Hier, Émeline et Kévin ont eu un mal fou pour être pris, et ont profité de touristes cherchant leur chemin pour se faire emmener malgré le passager. Après une bonne heure de marche à la sortie de la ville, nous nous arrêtons. À part quelques bus touristiques et des locaux, personne ne passe. Nous avons cependant de la chance au bout d’une heure quarante d’attente : un couple de la Terre de Feu nous prend. Coïncidence ? La voiture sent la même odeur que celle d’Alejandro qui vient de la même région. Très gentils, nos deux sauveurs tentent de nous faire passer pour des argentins au poste d’entrée – mais ici les vendeurs de billets vérifient les papiers au moindre doute. Au moins nous proposent-ils de nous ramener après la visite du parc, super !

Perito Moreno, glacier

Nous avons donc quartier libre pour visiter le parc. Plusieurs chemins s’entremêlent et donnent des points de vue différents sur le glacier Perito Moreno. Ce gros bout de glace blanc et bleu en impose, aussi bien par sa taille que par les borborygmes qu’il émet. La glace craque, cède parfois, des morceaux tombent. Pourquoi passe-t-on tant de temps à regarder ce bloc d’eau solidifié ? Selon moi, c’est parce que le glacier, comme une montagne, nous impressionne par son immortalité. Nous pauvres mortels, que sommes nous face à cette masse solide et pourtant mouvante ? En vérité ce genre de considération intellectuelle ne vient pas sur le moment, ni à moi, ni aux milliers de gens qui sont venus prendre une photo de famille devant le mur de glace. À propos de mur, nous dédicaçons cette photo à tous les spectateurs de Game or thrones pour qui le glacier rappellera probablement le mur de la Garde de nuit.

Le mur

Pour éviter à nos conducteurs d’attendre, nous nous dépêchons de terminer la promenade puis sortons du parc. À côté du parking, nous les attendons tranquillement en triant les photos. Ils finissent par arriver et ont pris leur temps, heureusement ! Ç’aurait été dommage qu’ils nous attendent. Ils nous déposent juste devant le camping, le luxe.

Mardi 28 janvier

On ne peut pas dire que nous sommes efficaces ce matin – ou cet après-midi, puisqu’il est déjà 13h quand nous bougeons nos fesses. L’objectif étant de rejoindre El Chalten, à 200km d’El Calafate. Nous préparons une pancarte signalant que nous sommes français, puisque de nombreux argentins nous ont dit qu’ils ne prendraient pas d’auto-stoppeurs du pays, par peur du vol. Confiants, nous marchons jusqu’au poste de police, loin de la ville. Erreur ! Il est déjà assez tard et peu de voitures passent. Plusieurs voitures chargées d’auto-stoppeurs nous narguent, nous sommes sûrement trop loin sur la route. À 18h00, nous nous disons qu’il est trop tard pour continuer à lever le pouce : pour peu qu’on nous emmène à une intersection, nous serions coincés pour la nuit.

Affamés, nous craquons pour une parrilla libre au camping : viande et légumes à volonté. L’agneau est décidément délicieux, bien cuit et bien gras comme j’aime par endroits. Le boudin est moins bon, mais c’est tout pardonné tant nos ventres sont pleins à craquer. Surtout que ce soir pas de tente à déplier : pour 10 pesos de plus, nous dormons en dortoir.

Mercredi 29 janvier

Nous avons bien fait de dormir au chaud, la pluie est tombée toute la nuit. Au réveil, il pleut encore et nous attendons l’accalmie. La tente d’Émeline et Kévin est trempée. Nous partons avant eux, confiants, en nous plaçant cette fois au deuxième rond-point après l’avenue principale. Un allemand attend déjà depuis un bout de temps. Visiblement agacé par notre présence, il nous invective en partant plus loin encore à la sortie de la ville. Tant pis pour lui si nous sommes pris. Une heure plus tard, nos deux compagnons de route français arrivent au même point que nous : on n’est pas sortis de l’auberge ! Un chien de berger les suit depuis le camping et se couche tranquillement à côté de Kévin. Tous les quatre attendons comme ça jusqu’à 12h. Notre joker, le bus de 13h, part bientôt et il serait dommage de perdre encore une journée dans cette ville touristique. Nous retournons en ville, le chien nous suit toujours ; sur la route, nous croisons deux français qui voyagent aussi en stop ; puis deux argentins à la fin du boulevard principal. Il y avait donc rude concurrence, autant dire que nous n’avions aucune chance.

Le stop, c'est que du fun

Au terminal de bus, nous profitons du retard de notre bus pour discuter avec une voisine de tente japonaise [nous ne connaîtrons jamais son nom]. Elle vient d’une ville de – seulement – 1 million d’habitants dans la région Kyushu et voyage seule, comme de nombreux japonais en Amérique du Sud. Cette destination est très prisée des nippons pour faire du trek, les montagnes japonaises n’étant pas très accessibles. Pour elle, il était difficile de trouver quelqu’un pour voyager avec elle, la région paraissant hostile pour beaucoup de compatriotes. Quand nous nous plaignons de ne pas bien saisir l’accent argentin, il faut imaginer être à sa place : elle ne parle que anglais (excellemment bien d’ailleurs) et pour elle, l’argentin ressemble… à de l’hébreu !

Quand le bus de nos amis français part, le chien de berger aboie de tristesse. Ça fend le cœur. Peu après, nous embarquons. Pendant le trajet, j’exerce mon néerlandais avec une expatriée en Allemagne qui part pour 3 mois avec son mari. Ils ont réussi à garder leur travail et leur salaire pendant leur voyage ; j’ignore si ce serait possible en France.

Arrivés à El Chalten, je suis sorti de ma torpeur post-sieste par les rangers du parc national. La visite de l’office des parcs nationaux est obligatoire pour tout bus entrant dans la ville. Bon point, ainsi les – je reste poli – ignorants qui dérogent aux règles ne pourront pas dire qu’ils ne savaient pas. Ça n’empêchera pas, plus tard, de voir des papiers par terre ou des israéliens qui empêchent tout le monde de dormir. Les informations sont claires, quoique parfois l’accent de la ranger est difficile à déchiffrer. Tant bien que mal nous arrivons dans le camping. Bonheur ! Une grande salle commune permet de faire à manger et rester au chaud jusqu’à 23h. Entre les chevaux et les haies, on sera bien ici.

El Relicho, camping du bonheur

Chemin de croix

5 Fév

image

Jeudi 23 janvier

Le jour du départ de Camarones est arrivé. Au pied de guerre, Kévin et Émeline nous saluent à 9h alors que nous sommes encore dans la tente. Peu de temps après, nos deux compagnons de route argentins s’en vont aussi. Nous prenons innocemment notre temps, un petit déjeuner, et vers midi nous sommes à la sortie de la ville, où nous retrouvons les argentins qui sont toujours là. Ils ont attendu 2h30, alors que les français ont été pris sous leur nez vers 9h ! Visiblement il n’y a pas foule. Un chien local est avec nous quatre et ne nous lâche pas la grappe. Est-ce un esprit réincarné qui nous protège ? Aucune idée, ce qui est sûr c’est qu’il ne fait pas venir les voitures plus vite. [NB: ce qui est sûr c’est qu’Hadrien fait de la poésie dans l’article mais qu’il a passé 1h à maugréer contre les mascotas du village. Et il continue dans chaque ville que nous traversons] On discute tranquillement avec nos compagnons d’infortune, parlons du film Amélie, Être et avoir et Entre les murs. À 13h30, nous ne levons pas le pouce quand déboule une voiture de policier, qui fait demi-tour à la porte de la ville. Nous nous regardons tous, presque paniqués – les argentins y compris ! Va-t-il nous aligner ? Nous demander de partir ? Arrivé à notre niveau, il nous demande si nous allons à la route 3 et propose de nous déposer. Va-t-on pouvoir passer à quatre dans la voiture ? On va essayer. Les énormes sacs entrent au chausse-pied dans le coffre et sur les genoux. C’est parti pour un trajet à 130km/h – rien à voir avec le trajet aller avec le camion de Pocho.

Compagnons de fortune

Nous quittons les argentins là où nous les avions rencontrés. Photo souvenir sur la route, puis le pouce en l’air les uns en face des autres. Eux partent au nord, nous au sud. Au bout d’un quart d’heure une Chrysler nous prend. Au volant, Juan Carlos, 53 ans, son fils part en Australie bientôt. Sur la route nous voyons pour la première fois des puits de pétrole et leur inlassable machine d’extraction. La fortune de Comodoro Rivadavia est basée sur la manne pétrolière, d’où notre volonté d’y passer le moins de temps possible. Notre conducteur nous dépose au meilleur endroit possible à Comodoro Rivadavia : la station service à la sortie de la ville. À la station service, nous nous faisons bénir par une famille de gitans. Entre nomades on se comprend, on s’observe, on se souhaite le meilleur. Et Sainte Sara est glissée dans le livre de route de Jum. Puis c’est parti pour une longue attente avec un débit de voitures écœurant.

Nous n’aurions jamais imaginé faire le trajet que nous avons fait ensuite. Quand Alejandro nous prend, il nous avertit qu’il s’arrête de conduire quand le soleil se couche. La nuit, il dort dans sa voiture et compte s’arrêter à Tres Cerros, petit bled tout juste entre Fitz Roy et Puerto San Julian. Ça ne nous arrange pas des masses, car s’il faut faire du stop au crépuscule, nous prenons un risque : de devoir dormir au milieu de nulle part. Je fais des calculs à toute allure dans ma tête et espère que le le soleil se couchera au moment d’arriver à San Julian. Malheureusement, une énorme déviation d’une heure et demie (à cause d’une fuite de gaz) nous empêche de rejoindre la route 3 rapidement. J’hésite à nous faire descendre à Fitz Roy, mais nous prenons le parti de dormir à Tres Cerros.

La compagnie d’Alejandro est sympathique. Il travaille dans une usine en Terre de Feu et revient de vacances à Salta. Dans son coffre, un tambour, de la taille d’une grosse caisse de batterie. Il joue dans un groupe folklorique avec un guitariste. Au lieu de l’habituelle radio, Alejandro nous sert une liste de lecture riche mais pas forcément à notre goût. D’abord, des chansons romantiques, qui ressemblent à ce qu’on peut entendre à la radio en Italie. Dispensable, mais le panel de chanson a le mérite de l’exhaustivité. On ne compte plus les fois où on entend le mot « corazón » à toutes les sauces. Ensuite, on a droit à l’un des genres favoris du pays : le rock nacional. Il y a du bon et du mauvais, mais c’est globalement plus proche de nos aspirations musicales. Nous discutons de l’inévitable sujet, attention… de la gastronomie (et non pas les Malouines) ! Tous les animaux sauvages que nous croisons sur la route écrasés ou vivants (guanacos, moutons, martinetas, lièvres) se mangent. Ça tombe bien, en France aussi on mange de tout. Puis nous apprenons qu’il y a plusieurs sortes de catholiques en Argentine. Alejandro nous explique qu’il parle directement avec Dieu, et que pour lui, le culte de Gauchito Gil reste de l’ordre de la croyance populaire. Sur la route, nous croisons et croiserons beaucoup d’autels dédiés à ce personnage, décorés de drapeaux rouges.

Autel dédié à Gauchito Gil

Nous arrivons pile poil au moment du coucher de soleil à Tres Cerros. Alejandro nous propose de nous emmener le lendemain vers 5h à Puerto Santa Cruz. Les places à l’hôtel sont très chères, mais on nous propose de dormir dans une tente derrière le bâtiment. Pas très rassurés par les clebs du coin et la route à proximité, nous nous défilons et allons réserver une chambre à l’hôtel – où il n’y a plus de place. Nous passerons donc une petite nuit à une table de la station ; on se relaie pour dormir, je prends un café en regardant Blood Diamonds en espagnol. Ensuite, c’est Jumaï qui veille. À 5h30, comme promis nous partons. Le soleil balance ses rayons horizontaux dans les yeux. Complètement exténués, nous ne sommes pas loquaces et dormons comme des souches sur – enfin ! – de la musique vraiment chouette : du folklore argentin avec flûtes au refrain (à écouter : Los Nocheros). Nous devons une fière chandelle à Alejandro qui nous a emmené si gentiment sur tout ce trajet. Sans lui, nous aurions peut-être dû dormir à Comodoro Rivadavia.

Une nuit à Tres Cerros

Vendredi 24 janvier

À 8h30, au croisement avec la route vers Puerto Santa Cruz, le froid est saisissant et je m’empresse de remplacer mon t-shirt par un mérinos, et d’ajouter un sous-pull. Assez rapidement, nous sommes pris par… encore un policier ! Il ne parle pas, ça tombe bien on a la flemme de discuter. Le camping de Puerto Santa Cruz est gratuit, et franchement très joli. Bien ombragé et protégé du vent, il est quasi vide et nous choisissons notre emplacement royalement.

Puerto Santa Cruz, 3000 habitants. Un enfant peut en faire le tour. Oui, enfin si l’enfant a des jambes solides, parce que les villes argentines ne connaissent pas la densité. Nous errons pendant une bonne demi-heure avant de croiser la moindre vie. Maisons cossues, grosses voitures, infrastructures en bon état et pelouses bien entretenues, pas de doute cette ville et ses habitants ont les moyens. Nous apprendrons plus tard que c’est probablement le barrage hydraulique en amont qui doit apporter du travail et de l’argent à la commune.

Puerto Santa Cruz, 3000 habitants

Les rues carrées démolissent notre conception de la ville européenne. Le centre n’existe pas, l’histoire non plus. Avec trois canons d’une grande violence on fait une allée centrale piétonne. Une banque de 1925 devient patrimoine historique – on ne sait pas vraiment pourquoi. L’église du 20ème siècle ressemble à tout sauf au 20ème siècle. On peut sans hésiter lui préférer cette église à la charpente métallique non loin de la Défense à Paris, tant elle semble si peu inspirée. Des bizarreries architecturales ponctuent notre parcours : un tribunal dans un pavillon ; des maisons de style chalet. À ce propos, il est curieux de constater que dans la province de Misiones (Iguazù), le bois était abondant mais tout était construit en brique. Ici, tout ce qu’il y a alentours c’est du caillou et des buissons, et l’on construit en charpente bois. La forme architecturale, plutôt que de s’adapter au contexte, ressemble à ce que les habitants veulent montrer d’eux même. Rien à voir donc avec notre architecture vernaculaire en Europe (maisons de vignerons, villages 100% bois de montagne, etc.).

Maison ordinaire de Puerto Santa Cruz

Les habitants de Puerto Santa Cruz sont aussi étranges que leur ville. Paniqués par la présence de touristes français, ils nous répondent vite, ne nous comprennent pas parfois. Après un tour par une supérette installée dans une halle de marché, nous achetons d’excellentes empanadas, à un prix défiant toute concurrence : 4 pesos l’une (moins de 0,5€). On aurait pu en prendre beaucoup plus que quatre.

Vannés, nous rentrons dormir à la tente, généreusement ombragée par une haie de bouleaux : ce chemin de croix nous a épuisés. Retour en ville ensuite, nous rencontrons enfin un habitant avenant – et beau gosse – à qui nous demandons où manger. Nous tombons une fois de plus sur un policier, qui nous propose même de nous faire emmener demain par un de ses collègues.

Le boui-boui dans lequel nous mangeons est honnête, mais nous aurions pu nous contenter d’une pizza seulement pour deux. Tant mieux, nous aurons des restes pour demain : nous profitons de la coutume du « doggy bag ». On potasse notre itinéraire de demain avec le gardien du camping. Il y a une erreur flagrante sur la carte IGN, puisque la route directe de Puerto Santa Cruz à El Calafate est en fait un chemin de terre qu’on nous convainc de ne pas prendre. On passera par Rio Gallegos. Non loin de la tente, des jeunes du coin se font un barbecue avec la sono tuning à fond ; ça ne nous empêche pas de dormir profondément.

Paresse à Camarones

29 Jan

Lundi 20 janvier

Motivés pour cette première journée de stop, nous partons sous un soleil de plomb. Comme je pensais avoir oublié la carte IGN (ce qui n’est pas le cas) nous rachetons une carte de la patagonie. Deuxième mission: trouver un couvre chef ! Tout est cher, tout est moche. Un peu blasés nous nous arrêtons dans un supermarché de bricolage sans trop y croire. Un des employés nous rattrape alors que nous allions sortir et nous fait signe de le suivre. Il déchire deux kits de bricoleur et nous offre les casquettes. Nous sommes désormais sponsorisés par : Hiper Tehuelche.
Rapidement, un homme nous prend en stop sans que nous ayons eu à lever le pouce (l’effet casquette sans doute). Il nous dépose à Trelew. De là, deux jeunes nous embarquent, ils écoutent du rock « nacional » et se dirigent vers la Tierra del Fuego. Ils nous laissent au croisement de la ruta 3, vers Camarones. Pour nous, pas besoin d’aller à Ushuaia, nous sommes déjà au bout du monde.

Camarones, paradis unique

Dans cette étendue désertique notre regard ne peut se poser que sur un panneau publicitaire « Camarones paraíso único ». Deux argentins sont déjà là, ils sont professeurs des écoles à Buenos Aires et remontent tranquillement vers le nord pour la rentrée. Ils sont pris par l’une des seules voitures de passage.

Pocho, son camion et Demian

Après quelques temps d’attente arrive notre sauveur ! Pocho et Demian, son fils acheminent l’eau potable vers les estancias alentours. Arrêt au rio souterrain pour remplir la citerne. Juste le temps pour nous de boire notre premier maté et pour Hadrien, de jouer avec Demian dans les flaques d’eau. Au village, Pocho et son oncle nous invitent à aller déguster une milanesa de guanaco dans la famille. Le rendez vous est donné à 22h.

Jeux d'eau à la station de pompage

Le petit camping de Camarones est génial ! En face de la mer, tranquille et ombragé. Nous rencontrons une petite famille de français partis pour 10 mois en camping car, un couple partis 3 ans en voilier et Émeline et Kevin qui voyagent un peu comme nous.

Le repas du soir serait trop long à raconter. Après le guanaco et les patates à la mayo, Nous avons trainé jusqu’à 4h du matin, parlant de tout et de rien. Une soirée vraiment géniale ! Hadrien est reparti avec un maillot de la Boca junior !

Grasse mat´ le lendemain, lessive et glandouille. Nous avons quand même visité la fierté du village (l’oncle de Pocho nous a plusieurs fois invité à la prendre en photo): la statue de saumon ! Moment d’émotion intense.

Camarones, capitale du saumon

Mercredi 22 janvier

On retend le pouce direction Cabo Dos Bahias pour voir la pingüineria ! Après 2h infructueuses nous retournons sagement au camping. Par chance, nous croisons Pocho et Demian sur leur départ à Trelew pour récupérer le camion Milagros. L’occasion d’une accolade et d’adieux. À 15h30, deuxième tentative de stop. C’est la bonne ! Susana et son fils, Maximiliano, nous embarquent ! Le gardien de la réserve doit être particulièrement détendu car personne ne paye le droit d’entrée. Le charme du bagou de Susana a fait son petit effet. La balade s’avère être bien plus chouette qu’à la péninsule Valdès. Et bien moins chère. Les manchots sont à quelques centimètres de nous, trop occupés à s’occuper des petits pour s’apercevoir de notre présence.

Nids de manchots

Manchot à 20cm

Leur démarche gauche les rend particulièrement comiques. Nos deux amis proposent de nous ramener. Susana s’arrête sur la plage pour ramasser des pierres. Elle les collectionne. Hadrien et moi nous sentons un peu comme à la maison. Les collectionneurs de pierre, ça nous connaît. Susana choisit un beau caillou pour mon papa et m’assure que non, il n’est pas lourd! Avant de se quitter, nous prenons un café à la station service de Camarones. Susana nous explique que Maximiliano est son fils unique. Tous les mercredis ils s’organisent un petit voyage, une virée rien qu’à eux. Elle compatit avec nos mères. Nous n’arrivons pas a nous quitter. Avant de reprendre la route, elle nous bénit (les argentins sont très croyants) et je ne sais pas pourquoi mais son geste fait s’envoler toutes mes peurs.

Maximiliano, Susanna et Jumaï à la pinguineria

Mieux qu’un safari

27 Jan

Samedi 18 janvier

À peine arrivés à l’auberge, un espagnol me demande si nous serions intéressés par le partage des frais pour une voiture de location. La péninsule Valdes comprend un circuit de plusieurs centaines de kilomètres qui nécessite une journée pour être parcouru. De plus, il faut faire 90km depuis Puerto Madryn pour y accéder. Autant dire qu’à pied ou à vélo c’est hors de portée. J’ai du mal à répondre à Élias qui parle pourtant un espagnol limpide. Marta, sa femme, et Manu, une française, arrivent à la rescousse. Jumaï et moi acceptons la proposition sans hésiter : seuls, nous n’aurions pas pu nous permettre de louer une voiture.

La route droite

Dimanche 19 janvier

Le lendemain, départ à 7h30. On en apprend plus sur Manu : elle habite en Suisse depuis 15 ans et a entrepris un voyage d’un mois, seule, entre deux emplois. Marta et Élias sont simplement partis pour quelques semaines en amoureux. Notre petite troupe part en Ford KA, une caisse à savon qui semble inappropriée pour les routes de graviers de la péninsule. Sur les premiers kilomètres on aperçoit déjà des guanacos, sorte de lamas sauvages. Quelques oiseaux « estúpidos », des martinetas traversent aussi la route. Leur particularité : tenter de traverser uniquement quand une voiture arrive, puis faire volte face quand le risque est trop grand. Pour nous européens le décor paraît irréel : les routes sont toutes droites, et les alentours déserts. Nous ne nous doutons pas alors que ce paysage serait le même pendant des centaines de kilomètres, à perte de vue, pendant une grosse partie de la Patagonie.

Manchot de Magellan

Sur la route de la péninsule, plusieurs points de vue permettent d’admirer des colonies d’animaux sauvages, en totale liberté. En premier, nous passons voir les manchots de Magellan. C’est incroyable ! Ils sont à moins d’un mètre des barrières, allongés ou debout les yeux fermés : ils glandent sévère. Si j’avais su, un jour, que plus tard je verrais ces animaux en liberté mais si près de moi, je ne serais jamais allé au zoo. Quel plaisir de voir qu’ils sont sans contrainte, sans heure de repas fixe. Là au moins, on sait qu’ils ne font rien si ça leur chante.

Ensuite, un tour par les éléphants de mer. Mettons fin à d’interminables débats : les éléphants de mer sont des phoques, reconnaissables au pif typique des mâles. Ils se déplacent comme des chenilles, faute de pattes arrières vraiment capables, contrairement aux lions de mer. Ces derniers sont de la famille des otaries et le mâle a une sorte de gros goître. Leur tronche ressemble d’ailleurs vaguement à celle des lions de terre. Les éléphants de mer ne sont pas passionnants : seuls les femelles sont là, et elles ne font que dormir. Ces grosses saucisses s’étalent tranquillement sur la plage ; certaines se déplacent avec peine d’un mètre, puis se recouchent, las d’avoir fait tant d’efforts.

Lions de mer

Plus loin, on peut voir les lions de mer, pour qui c’est la période de reproduction. Des bébés déjà nés grouillent entre et sous les adultes. Les mâles se battent pour la deuxième tournée de reproduction. Le mâle qui réussit à se faire une femelle l’écrase sous son poids en creusant un trou. Elle n’a pas son mot à dire. En comparaison, les manchots de Magellan sont d’une rigueur extrême, puisque les couples de manchots se forment pour la vie. Les lions de mer offrent un spectacle incroyable, que ce soit au niveau visuel, sonore ou olfactif (on vous laisse deviner ce que ça sent). Autour de ces énormes bestioles rodent de nombreux goélands et des espèces de gros goélands gris à très grande envergure (au nom inconnu). Ils cherchent un peu de placenta à picorer, mais le gardien nous apprend qu’il leur arrive, par erreur, de dévorer les entrailles d’un petit en commençant par le cordon ombilical. Certains goélands ont le bec et la tête couverts de sang.

Piche

Nous pique-niquons près des toilettes – glamour. Il n’y a pas de table de pique-nique, et quand on voit le comportement des gens on comprend pourquoi. Les touristes donnent à manger aux tatous locaux, les piches, qui n’hésitent pas à venir quémander. Il y a encore du boulot pour supprimer les panneaux indiquant expressément de nourrir les animaux sauvages.

Lion de mer et parasites

Après être retournés voir les lions de mer, nous faisons un tour par Puerto Pyramides pour faire le plein. Le lieu est ultra touristique mais l’accumulation de sédiments qui forme un grand rocher plat est une curiosité. Élias réussit un saut par dessus une flaque ; la mer est cadrée par un goal donnant sur l’eau.

Cadrage

Malheureusement, la station service est fermée, nous devrons finir l’excursion avec tout juste de quoi finir (environ 90km), donc pas d’île aux oiseaux. C’est, dit-on, sa forme qui a inspiré Saint Exupery pour le dessin du serpent digérant l’éléphant dans Le petit prince. Une fois à Puerto Madryn, je pars faire les courses. Nous allons manger des légumes ! C’est le moyen que nous avons trouvé pour manger le plus économiquement. Et demain nous partons à l’aventure en stop !

Un pas vers la Patagonie

24 Jan

La chaleur nous aplatit dans la capitale, une fois revenus des chutes. De l’eau plein les mirettes, nous sommes contents de retrouver l’auberge-coloc. Avant ça, nous avons dû subir un trajet mouvementé en car : au bout d’une heure de route, le car s’arrête à une station service pour réparer la boîte de vitesse.

Américaine

On attend pendant deux bonnes heures, et le spectacle en vaut la chandelle. Des éclairs tombent du ciel, l’orage crée une ambiance incroyable qu’il me serait difficile de décrire, si ce n’est avec ces quelques clichés volés à la foudre.

Ambiance électrique

Au terminal de bus Retiro, nous nous empressons d’aller acheter nos billets pour Puerto Madryn. On demande à quelques guichets au pif, mais évidemment les prix sont partout les mêmes. Je croyais que le système de vente de billets était ultra-libéral, en vérité les différentes compagnies de bus appliquent un même prix, entendu ou imposé ? No se. On reclame la réduction étudiante, on nous la refuse sous des prétextes bidons : « elle n’est valable que pour les étudiants argentins, » « elle ne fonctionne pas pour ce trajet, » Bref, on se moque de nous. Nous réessayons au guichet Andesmar de l’aller où ce monsieur nous avait accordé la réduction sans rien demander. Là, c’est une petite dame qui occupe le guichet. Bingo ! Non seulement elle nous accorde la réduction sans rien nous demander, mais en plus elle est d’une formidable gentillesse et d’une grande prévenance. Si vous prenez le bus depuis Retiro dans les prochains mois, on ne peut que vous recommander d’aller au guichet 147 Andesmar, ils vendent aussi des billets d’autres compagnies.

À cause du retard du car et de notre détour par le guichet des gentils vendeurs, nous ne pourrons pas aller au MALBA comme nous l’avions prévu : il ferait nuit avant d’y être et Renato nous déconseille le quartier le soir. À la place, nous visitons Palermo viejo et Palermo Hollywood.

Camillo

Dans une petite rue décorée de graffs, un chat miaule derrière une porte en métal – sur laquelle est peinte un chat. La place Cortazar est un point de rencontre pour toutes sortes de gens. Entre le tumulte des automobiles et la musique des bars encore vides, des jeux font le bonheur d’une myriade d’enfants. Palermo Hollywood nous plait moins : que des restos, peu d’ambiance. Le quartier est chic et ça se voit. Nous terminons notre parcours par une parrilla délicieuse, où nous faisons la bêtise de dévorer tout le chimi churri avec du pain, alors qu’il s’agit d’une sauce pour la viande (délicieuse au demeurant).

Le lendemain, nous allons enfin au rosedal qu’Alejandro nous a chaudement recommandé, en plus des parcs, tous concentrés au nord de Palermo. Il fait chaud, très chaud. Les argentins ne sont pas les professionnels du parc, la plupart des entrées sont fermées et il nous faut faire le tour du jardin botanique pour atteindre le rosedal, un endroit bien romantique décoré de… roses. On rencontre Gontran, un canard hautain avec une houpette.

Le MALBA n’est plus très loin, mais chaque pas nous coûte cher en litres de sueur et d’eau potable – et encore, nous sommes sous l’ombre des arbres. On passe devant un club amical – entendez par là club de gens fortunés ; des parents larguent leur marmaille pour le court de tennis ou la piscine. Enfin ! Le musée pointe le bout de son nez. Nous aurons donc fini par voir au moins un bâtiment conçu par de vrais architectes d’aujourd’hui. L’ensemble est une réussite : belle lumière, belle scénographie, beaux espaces d’exposition. Des coursives à chaque étage donnent sur l’atrium et donnent accès aux expositions, dont la visite n’est pas contraignante : on sort et on entre dans le sens qu’on veut, ça n’a pas d’importance. Les coursives laissent place à quelques œuvres qu’on peut aussi apprécier depuis les escaliers mécaniques une fois la visite terminée. Une terrasse dépréciée mais accessible fait penser à l’IMA de Nouvel – avec une finition bien meilleure. La collection est d’une grande richesse, d’autant plus qu’on ne connaît pas les artistes exposés. Pas de super coup de cœur (et non supercopter), sauf cette exposition faite sur mesure par l’artiste Liliana Porter. Son œuvre-univers composée de bibelots, objets divers (sables colorés, recipients, bris de porcelaine, piano, fils), et petites figurines nous absorbe pendant un bon moment.

Liliana Porter

Deux bancs créés par des artistes nous donnent envie d’avoir les mêmes à la maison. L’un des deux se ramifie à travers tout l’atrium du musée. En définitive, on ne peut que chaudement recommander ce musée, que ce soit pour son architecture et/ou pour ses expositions, qui ont de plus la qualité d’être aisément parcourues en deux heures (et en prenant son temps, foi d’Hadrien). La bibliothèque et la petite boutique de créateurs sont dignes d’intérêt.

Après le musée, nous pensions repasser par les parcs à la fraîche, mais nous renonçons, faute d’énergie. À l’auberge, je tente de convaincre Jumaï – en vain – d’aller voir Jennifer, un film style Carrie un peu nanar par un ancien de Disney. En plus, Renato nous avait proposé d’y aller ensemble ; dommage. Une fois de plus, après manger et discussion avec les gars, on va dormir comme des masses.

Le lendemain, nous pensons avoir le temps avant d’aller prendre notre collectivo à 19h15. Erreur. Jumaï et moi nous réveillons assez tard, et nous devons faire nos sacs. On espère pouvoir faire quelque chose (San Telmo ou les lieux du centre que nous avons loupée), mais finalement on se contentera d’une promenade sur Córdoba et d’une galère pour trouver des sous et faire nos courses.

Renato et Jumaï sur le départ

À Retiro, le car arrive avec 1/2 heure de retard – nous avions 1h d’avance. S’ensuit le trajet en car le plus long depuis le début du voyage. Au bout d’une heure de route, le car a un problème technique et nous patientons sans climatisation dans un bled sans intérêt autour de Buenos Aires : 2h d’attente. Au bout d’une nuit de trajet, on s’arrête à Bahia Blanca qui n’est pourtant pas si loin de la capitale. À peine quitté le terminal, le car s’arrête dans un garage à car. Nous attendons, puis, pour une raison inconnue, on fait deux fois le tour de cette maudite ville avant de s’arrêter de nouveau. Heureusement, pour une fois la programmation cinématographique n’est pas mal : bon son, écrans cathodiques avec une bonne image (mais de la neige dès qu’il y a une bosse sur la route), films de bonne facture (Captain Phillips avec Tom Hanks ; une sorte de comédie romantique argentine avec un nain). Le service est pas mal, mais les sièges laissent à désirer. Pour les 23 heures que nous avons passé dedans, c’est un comble.

Nous arrivons à Puerto Madryn avec 5h de retard. Pas le temps de chercher un bon endroit où dormir, on va là où il reste de la place. L’auberge est chère, mais elle nous permet de rencontrer Marta, Élias et Manu (au féminin). C’est parti pour la découverte de la Patagonie.

Iguazú sous la pluie

17 Jan

Chutes mysterieuses

Samedi 11 janvier

Repos avant de prendre l’omnibus à 15h. Depuis qu’on est ici, on se sent un peu surpuissants: on se lève tous les jours à 9h !!! (Certes les plus malins auront fait le calcul, ça équivaut à 13h en France, soit une bonne grosse GRASSE MATINÉE !)
En revanche s’il y a une chose sur laquelle l’Argentine n’a aucun pouvoir, c’est notre fâcheuse tendance à toujours être à la bourre! Et deux petites heures avant de monter dans le bus, Renato panique un peu pour nous et nous conseille de prendre un taxi, rápido ! Les radio taxis jaunes et noirs pullulent et notre mère de substitution nous jette à l’intérieur, après s’être assuré que le chauffeur prenne la route la plus rapide.
Au final, on doit bien avoir… 1 bonne heure d’avance. J’achète donc un magazine spécial ruta 40 afin d’améliorer mon espagnol et Hadrien regarde les Simpsons par dessus l’épaule d’un gros monsieur. Oui, ici, contre quelques pesos, on peut regarder la Tv dans les gares ! Après quelques minutes de stress et l’aide des gentils employés de la gare routière, on fini par monter dans le car direction Puerto Iguazú. Suivront 18 h de car inénarrables. Notons seulement qu’on a pu voir des films de baston avec Bruce Willis sous-titrés en espagnol ET en chinois, qu’un enfant à vomi sous mon siège à la moitié du trajet, qu’on a mangé des crackers à la mayo et qu’on a eu très froid. A quoi ça sert d’avoir un guide si on ne lit pas les bons conseils qu’il donne. Oui, dans les bus il fait 14 degrés alors oui, il faut mettre une petite laine. Mais que tout le monde se rassure (ne dites pas le contraire, je sais déjà qui a tremblé pendant la lecture de cette phrase), après marchandage avec le conducteur nous avons pu récupérer nos duvets.

Dimanche 12 janvier

Arrivés à Puerto Iguazú, nous partons à la recherche d’une auberge de jeunesse qui ne soit pas complète. En Argentine, les grandes vacances durent de mi-décembre à fin février et les prix grimpent considérablement lors de cette période. Nous dégotons finalement des lits à l’auberge Iguazú falls. La nuit est à 100 pesos par personne soit le double de notre « coloc' ». Mais nous pourrons au moins profiter de la piscine !
L’auberge est pleine de gens venus d’un peu partout. Nous avons fait la connaissance de Thibault et Caroline, deux français venus étudier à Bahia Blanca pour un semestre. On passe la journée à ne rien faire car nous préférons attendre que le problème de pied d’Hadrien s’arrange avant d’entamer la balade de 4/5H.

Lundi 13 janvier

Le pied d’Hadrien ressemble toujours à une courge malgré les applications quotidiennes de vegebom et d’huile essentielle de niaouli. Mais tant pis, on ne va pas rater les 275 cataratas, inscrites au patrimoine mondial de l’UNESCO, pour une grosse courge.
C’est donc poursuivis par des coatis dégénérés et gourmands que débute la balade. On en prend plein les mirettes puis, au moment d’aller sur l’île San Martin, il se met à pleuvoir, ce qui rafraîchit pas mal l’atmosphère.

Inutile de dire que c’était super, même si on a parfois l’impression d’être à Disneyland tant il y a de monde. Je m’attendais aussi à voir plus d’animaux ou d’insectes mais pas l’aile d’un morpho à l’horizon lors de cette journée.

Chutes d'Iguazú

Sur le chemin, nous avons rencontré Benjamin, et sa copine argentine Katherine qui nous a beaucoup appris sur son pays bien que nous ayons une vision du monde radicalement différente. Le soir elle nous a dégoté un petit resto mexicain ou nous avons mangé tous ensemble un repas gargantuesque : des tortillas maison, 2 poulets, des fajitas, des tonnes de frites et deux tranches de tomate (on vous a déjà dit que les argentins détestent les légumes?). Le tout pour 7€ chacun. Katerine n’hésite pas à marchander la moindre chips.

Avant de dormir, on se fait rouspéter par ce qu’on croit être un grand australien mal luné (sûrement à cause du slip kangourou) parce qu’on a baissé la clim qu’on a en pleine tronche et qui fait un bruit de vieille tondeuse.

Mardi 14

On a un rhume, le grand australien est en fait un grand allemand et il n’a même pas la goutte au nez (protection du slip kangourou). On s’est levés tôt (comme TOUS les jours) pour aller voir les chutes du côté brésilien. Mais bizarrement je ne peux pas retirer et la machine ne veut pas de la carte d’Hadrien. Le temps de checker les comptes et de mailer nos banques il est déjà tard. En plus, nous avons couru dans Puerto Iguazú pour faire des photocopies de nos papiers afin d’obtenir la réduction étudiante pour le retour à B-A. Bref, après moult réflexions, nous décidons quand même de traverser la frontière malgré le fait que nous ayons notre bus à 17h45.

Nous sommes assez frustrés d’avoir fait la deuxième balade au pas de course mais la vue d’ensemble des chutes en valait la peine. A savoir : le côté brésilien est globalement moins joli que le côté argentin et je pense qu’il vaut mieux commencer par celui-ci et garder le meilleur pour la fin !
Pour ménager Hadrien nous n’avons pas fait le sentier Macuco qui se termine par une baignade mais aucun regret de ce côté là ! Nous n’avons pas non plus visité les ruines jésuites aux alentours de San Ignacio, découragés par les heures de bus supplémentaires.

Retour à B-A ! Une heure après le départ, nous sommes à l’arrêt puisque le levier de vitesse s’est littéralement désolidarisé du reste. Nous avons gentiment attendu 2h que le réparateur arrive avec la pièce de rechange. Par chance un orage de chaleur magnifique nous a occupé. Nous avons discuté avec une française, prof d’espagnol aux USA qui emmène chaque année sa classe en Argentine pour 3 semaines. Génial. Et regardé des nanars à la télé.

À propos des daguerréotypes

15 Jan

Chers lecteurs,

Cela ne vous aura pas échappé que le site manque d’images. Rassurez-vous, nous avons à notre disposition de nombreuses images qui égaieront vos yeux. Malheureusement, le débit d’envoi dans l’auberge de Puerto Iguazú est très lent. Nous avons donc du limiter notre envie irrésistible de partager nos impressions photographiques, et, admettons-le, faire un choix drastique quant aux éléments mis en ligne. Je suis en train de mettre à jour les articles déjà publiés avec quelques photos. Sur notre compte flickr également, vous trouverez ces photos et quelques autres, ainsi que toutes, oui toutes les photos prises avec l’iPod touch. La qualité n’est pas aussi bonne qu’avec l’appareil reflex, mais cela devrait convenir comme aperçu de ce que nous voulons montrer. Quant aux nouvelles fraîches du voyage, Jumaï à promis de faire un article ce soir, puisque nous sommes revenus d’Iguazú. Mieux vaut tard que jamais !

Votre humble serviteur, le lutin technicien du 3ème sous-sol à gauche, 4ème bureau,

Neirdah